Suivant un bon mot dont beaucoup réclament la paternité parce qu’on en ignore l’auteur, il n’y a que deux façons efficaces d’attirer le touriste: soit la visite de beaux monuments, soit la perspective de bons moments. Lahcen Haddad en a forgé une troisième : convaincre les Marocains résidant à l’étranger, ces MRE qui après onze mois de dur labeur ailleurs reviennent par millions au pays pour les vacances d’été, de faire œuvre pie en venant plus nombreux que de coutume revoir les leurs. Pour lui, c’est la meilleure manière de remettre le tourisme sur les rails de la croissance. Car le fait est avéré : le tourisme va mal. Certains disent même qu’il va de plus en plus mal. C’est en particulier le cas des professionnels, frustrés de ce que les activités du séjour, des voyages et des loisirs n’aient réalisé que 4% de recettes additionnelles l’année dernière par rapport à celle qui l’a précédée. La faute au Printemps arabe, expliquent-ils. «Si certains touristes aiment, c’est à la télévision ou sur leurs journaux». Conséquence : les tour-opérateurs sont aussi inquiets aujourd’hui qu’au premier jour du «printemps». Selon certaines sources, ils auraient connu «une saison dramatique» avec un recul de leur chiffre d’affaires de 28% sur la Tunisie, de 42% sur l’Egypte et de 28% sur le Maroc. Seconde conséquence : le Maroc a rétrogradé, passant à la 24ème place mondiale pour les arrivées et à la 36ème pour les recettes. Pas sûr dans ces conditions que le tourisme réédite ces exploits passés. D’autant plus que les visiteurs viennent en majorité de France (30% environ), d’Espagne, d’Italie, d’Allemagne, du Royaume-Uni et de Belgique, pays en pleine tourmente économique. Alors la tentation est grande de faire son marché ailleurs. En Russie et dans ces nouveaux pays européens – anciennement de l’Est – où l’émergence de nouvelles classes moyennes pousse au voyage. Dans les pays nordiques, cet éternel projet est toujours remis sur le métier sans que le charme ne parvienne à opérer. Pourtant les enjeux sont importants. Le tourisme participe pour presque 10% dans la formation du PIB et les recettes issues du voyage se sont montées à une soixantaine de milliards de dirhams en 2011, année au cours de laquelle elles ont été 9,5 millions de personnes à visiter le Royaume dont le quart environ de Français et d’Espagnols. Mais là aussi les professionnels n’espèrent pas de miracle dans l’immédiat. La crise s’installant en Europe, il n’est pas sûr que les arrivées retrouvent de sitôt leurs anciens niveaux. Il est également fort probable que les 4 millions de MRE qui ont visité le pays l’année dernière n’y reviennent pas en si grand nombre. D’ailleurs, sont-ils des touristes ailleurs que dans les registres statistiques, ces Marocains qui rentrent chez eux ? Le débat n’est pas clos.