Economie

Tourisme : Les vérités de Abdelhadi Alami

Abdelhadi Alami devrait présenter, aujourd’hui mardi 2 mars, son livre “ Le tourisme marocain, l’éternel espoir“ à l’ISCAE. Comptant parmi les pionniers du secteur pour avoir lancé la chaîne hôtelière Dounia PLM et construit à Marrakech l’unique Palais des congrès du Maroc (groupe géré aujourd’hui par Kempinsky), l’auteur analyse dans un style clair et fluide avec des chiffres à la clé, la situation du tourisme national en mettant en relief sa force, ses faiblesses et ses incohérences.
L’introduction commence par une parole du poète qui a décrit le Maroc comme une “porte ouverte sur le rêve“. Tout y est dit. En effet, le pays ne manque pas d’atouts naturels et de patrimoine culturel qui le qualifient à être un pôle touristique de premier plan. Or, le niveau des flux touristiques reste faible en comparaison des potentialités offertes. Et c’est tout le problème au Maroc de cette activité pourvoyeuse de devises et d’emplois. “Le Maroc d’avant 2001, explique M. Alami d’entrée de jeu, n’a jamais eu une politique touristique globale, prévoyant une croissance soutenue et mettant en place les moyens nécessaires pour y parvenir“. Cette date (janvier 2001) marque la signature de l’accord-cadre sur le tourisme entre les pouvoirs publics et la fédération du secteur en présence de S.M le Roi Mohammed VI. Cette action illustre pour la première fois la volonté au plus haut sommet de l’État de faire du tourisme une priorité nationale avec des objectifs précis. L’espoir est permis.
En attendant que le tourisme national décolle, Abdelhadi Alami s’interroge : “ Comment pouvait-on (…) “rater“ notre tourisme et ne pas le hisser après quatre décennies aux fonts baptismaux de la réussite ? “Comment ne pas, poursuit-il, s’inscrire résolument dans la perspective de ce “don du ciel“ qui nous était fait : la mer, le soleil, la cadre physique et naturel, une population accueillante, une diversité ancrée dans les profondeurs de l’Histoire et de la civilisation ? Pour montrer le retard du tourisme marocain, l’auteur signale la part du Maroc dans les flux touristiques internationaux : 0,8% en 2003 contre 0,8% en 1993. M. Alami donne d’autres chiffres significatifs. Le Royaume est classé quatrième derrière des pays comme la Turquie, la Tunisie et l’Égypte en termes de nombre de touristes et de capacité hôtelière.
Pour montrer les contradictions du secteur, Abdelahdi donne encore quelques indications chiffrées sur l’évolution du nombre de lits : 70.000 en 1986, ils ne sont que 103.138 en 2002, soit une augmentation de moins de 40.000 lits en l’espace de près de 16 ans. La stagnation est patente.
Paradoxalement, cette stagnation ne s’est pas répercutée sur les recettes touristiques qui ont même connu une hausse importante de 8,7 % en moyenne durant les dix-sept dernières années. L’auteur signale cette bizarrerie statistique tout en marquant son étonnement. Les chiffres ont-elles été tripatouillés? M. Alami, qui n’est pas allé jusqu’à le dire, donne des exemples dont celui-là : “ entre 1992 et 1995, le Maroc a reçu respectivement 6,2 et 2,8 millions de visiteurs enregistrés aux postes frontières. À la fin de ces mêmes années, les recettes, elles, ont enregistré des montants équivalents : 11,7 milliards de dirhams en 1992 et 11,07 milliards de dirhams en 1995. “Comprenne qui pourra“, conclut l’écrivain qui livre des chiffres aussi fantaisistes relatifs aux taux de fréquentation ou de retour (des touristes). Indicateur important qui permet de connaître le degré de fidélisation des touristes, ce taux était officiellement de 41,4% lors de la période 1986-2002 (17 dernières années) et de l’ordre de 28,5% en 1991 et de 51% en 1999 et 2000. Ces chiffres ne recoupent nullement la courbe en dents de scie ( entre stagnation et recul) des entrées des touristes au Maroc.
Ces contradictions sont peut-être à mettre sur le compte du manque de transparence qui caractérise l’activité touristique au Maroc. On corrige les statistiques pour accréditer l’idée que tout va bien dans le meilleur des mondes. Ainsi va le tourisme au Maroc.
Un secteur qui n’est pas à un paradoxe près. En expert de la chose touristique, rompu également au monde des chiffres, Abdelhadi Alami décortique une à une les contradictions qui minent le secteur, dont la principale concerne le financement des établissements hôteliers par le CIH (Crédit immobilier et hôtelier). “ Les hôteliers, explique M. Alami sont vite devenus victimes (…) de leur banque dès lors que les taux étaient situés entre 15 et 17% alors qu’il n’y a pas eu au monde un seul investisseur opérant légalement qui soit en mesure de rentabiliser son entreprise sur de telles bases“. L’auteur aborde ensuite le problème du foncier qui a longtemps bloqué le développement du secteur.
Abdelhadi Alami ne se contente pas seulement de critiquer. Il donne des pistes de réflexion à même de sortir le tourisme de l’ornière où il s’enlise, comme la libéralisation du transport aérien. La vision 2010 sur laquelle le Royaume fonde des espoirs énormes pour accueillir 10 millions de touristes, l’auteur lui consacre tout un chapitre. Ce qu’il présente comme un modèle de développement, Abdelhadi Alami estime que celui-ci “ne pourra être optimisé que s’il s’insère dans un nouveau projet de société fondé sur la mise à plat de ce que nous sommes et de ce que nous voulons être“. Tout un programme.

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