Editorial

Bonne année, quand même !

© D.R

Avec l’approche de la fin de l’année, nous rentrons dans une période de bilans et de célébrations. Nous allons nous y mettre aussi. Modestement. Car ce n’est pas parce qu’il faut faire des voeux que chacun doit basculer dans l’emphase, la grandiloquence ou l’affectation.
Il faut savoir garder les pieds sur terre. Ce n’est qu’une année qui part et une nouvelle qui arrive. C’est peu quand notre foi nous invite à l’éternité. Nous sommes éternels, c’est un fait révélé. Malheureusement nos problèmes, aussi, le sont.
Ce n’est pas pour vous gâcher le réveillon mais rien ou si peu changera avec la nouvelle année. Pas besoin d’être Madame Soleil, ou l’excellente Elizabeth Tessier, pour prédire ce qui va se passer chez nous.
On continuera à nous haïr avec autant de plaisir. A nous dénigrer et à hurler notre douleur de Marocains enivrés et terrorisés par notre propre liberté. C’est dur de prendre en main son destin sans douter, de se pencher sur son passé sans fléchir, de penser à son avenir avec ambition, d’avoir un projet réalisable pour soi, d’être autonome et responsable tous les instants.
Hurlons. Il pleut. Crions. Nous existons. Pleurons.
Nous avançons. Doutons. On risque de réussir.
Bavons. L’intelligence nous submerge.
Continuons à être des petits Marocains à la petite semaine c’est dans notre petitesse que se niche justement notre grandeur perdue. Elle est visible à l’oeil très nu. Quant à notre génie, il est en congé prolongé de reptation. Il avance sur le ventre.
La liste des serpents à plumes s’allonge. Une nouvelle liste noire balancée par une barbouze immaculée, un journaliste psychopathe, un maître chanteur dérisoire, un orateur chantre exclusif de sa petite liberté d’expression. On a oublié l’avocat, humaniste, hommes d’affaires foireuses. Mais on y reviendra. Alors une ONG pour organiser tout et, à terme, on peut toucher des subventions, des indemnisations, des pots de thé, un bakchich démocratique labellisé transition.
Quand on est en colère, on ne souhaite rien aux autres. Pas, bonne année. Pas, bonnes fêtes. Et alors ? Ne m’embêtez pas, sinon je vais téléphoner à Jean Pierre Tuquoi, tout dire à Stephen Smith, appeler Robert Mesnard de Reporter sans frontières héritées du colonialisme. Je ferai tout ça. Oui.
Au fait, salut Jean-Pierre ! cela fait longtemps que l’on ne s’est pas écrit des gentillesses. Le Monde va mal, et toi-même tu ne te sens pas très bien. Je le sais.
Alors, arrête de bidonner mon gars ! Varie tes sources. Vois de vrais gens. Change de calepin. Écris de vrais livres comme Edwy. Respire un bon coup. Et bois une bonne verveine. Ça ira mieux l’année prochaine. Le Maroc sera toujours là, ne t’inquiète pas. Tu pourras encore bien gagner ta croûte, un pain béni, en tartinant sur la transition qui dérape, le retour des années de plomb, la succession inachevée parce qu’un copain t’a passé un coup de fil, les millions de disparus, les 157 stades lieux de tortures, les 386.745 tortionnaires, 256 cadavres authentifiés de Benbarka, les 485 directeurs de l’AFP virés, et les dizaines de milliers de journalistes arrêtés. Ça va être un régal. Le Maroc ne va pas se gêner pour te donner des biscuits.
Quand on a des copains comme toi, on n’a vraiment plus besoin d’adversaires. Tu nous suffis, largement. Et nous aussi, on te suffit largement. Alors pourquoi se souhaiter une bonne année ? Au diable les voeux, on sera toujours là.

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