Editorial

Éditorial

L’escarmouche sérieuse entre le PAM et le PI à Fès sur cette affaire d’interdiction de la vente d’alcool a, à l’évidence, servi à un étalonnage politique entre le deux partis. Localement, ils se sont mesurés sur une question où l’authenticité de l’un pèse manifestement plus lourd que la modernité militante de l’autre. Un observateur assidu et expérimenté fait la remarque suivante: «Ni Chabat, ni le PI ne sont candides. Cette histoire d’alcool est tout simplement une aubaine inespérée avec laquelle ils ont complètement retourné la notion de modernité en la vidant de sa substance pour n’en garder que les désagréments. Ils ont surfé sur le populisme et renvoyé cette notion délétère à la face du PAM. L’alcool est lié à la délinquance et l’insécurité. Qui pourrait dire le contraire surtout à Fès où la police est débordée.» C’est peut-être la première fois que le PAM est renvoyé dans les cordes de cette manière. La rudesse de sa réaction, en confondant parfois les rôles, et en essayant de supplanter l’autorité administrative, montre son désarroi politique. Si la recomposition du champ politique marocain aboutit à une alliance stratégique entre le PI et le PJD sur des valeurs de cette nature et des postures politiques de ce format, il sera difficile aux tenants de la modernité de continuer à utiliser ce concept s’ils ne lui donnent pas un véritable contenu sémantique et idéologique exploitable immédiatement notamment sur le plan politique. La modernité n’est pas réductible à la défense de la consommation de l’alcool dans un pays musulman. Ça serait caricatural. Mais sa promotion repose sur un projet de société clairement affiché et  ne peut pas faire l’économie d’une analyse approfondie des rapports entre l’Etat et la religion, de l’Etat de droit, du progrès, des libertés individuelles, de la liberté d’expression, de la parité, de la citoyenneté, de l’égalité, etc. L’urgence de la construction d’un appareil partisan n’a peut-être pas encore permis au PAM — il en a les outils — d’affiner ces questions, mais il est clair que ses adversaires conservateurs coalisés l’obligeront à le faire assez vite. Chabat à Fès a levé un gros lièvre, et l’Istiqlal n’est pas le pauvre RNI.

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