Editorial

Éditorial

L’hommage rendu à Othman Benjelloun cette semaine à Fès restera sans aucun doute gravé dans les mémoires. Un moment rare, dense et précieux. Le lieu, d’abord. Le palais Batha, un espace raffiné que deux Rois ont marqué de leurs empreintes indélébiles ; ensuite, un arbre vivant, multiséculaire aux branches déployées dans toutes les directions de la vie sous lequel la parole s’est libérée. Othman Benjelloun était l’objet principal du discours. Toutes les déclinaisons que le genre de l’hommage permettait étaient autorisées. Les orateurs ne se sont pas gênés. Un va-et-vient incessant entre la personne, l’œuvre, le parcours, les relations, les amitiés, les amours, la vision… Le talent des orateurs, leur style, leur finesse, parfois leur pudeur ou leur fébrilité, étaient sollicités. On se prenait à penser que dans la culture marocaine, il existe un art rhétorique authentique, celui de rendre hommage à la vertu, au mérite et au talent de l’autre. Dans le cas inverse, notre culture ancestrale privilégie le silence qui est un art, peut-être, plus complexe que le premier. Chacun des laudateurs sincères, ou des invités ravis, heureux d’être là, avait son mot à dire sur Othman Benjelloun. Chacun, un jour, avait croisé le chemin de cet homme. Il en gardait un souvenir ému. Intime. Personnel. Les circonstances de cette rencontre sont naturellement gardées secrètes mais à leur sujet l’on suggère l’écoute, le regard, l’attention, la singularité, la compassion, le souci des gens, la bienveillance. Frédéric Mitterrand, dont la culture et la maîtrise du verbe le rendaient, par métier, bien avant qu’il ne soit ministre, éligible à la palme d’or des discours de circonstance, a réussi un hommage émouvant et sensible qui place Othman Benjelloun parmi les rares figures paternelles qui éclairent encore le chemin du ministre qu’il est devenu d’une lumière affectueuse. André Azoulay n’a pas été en reste. L’élégance coutumière de ses discours a trouvé dans le rappel de quelques valeurs cardinales qui ont jalonné la carrière de Othmane Benjelloun une matière noble qu’il a su pétrir avec les mots d’une amitié intransigeante. Que dire de l’intervention de Mohamed Benaissa ? Un texte d’anthologie qui doit tout à une expérience vécue, concrète et absolue. Le diplomate a immédiatement fui le vocabulaire convenu de son métier — un lexique évanescent — pour se réfugier corps et âme dans la grammaire ordonnée de l’amitié , celle qui garde au sujet sa place qui lui sied, et pour s’abriter dans la syntaxe du coeur dont les battements ponctuent les élans de toute générosité. Othmane Benjelloun a toujours été, un Pygmalion de génie, il révèle les autres à eux-mêmes, et dévoilent leurs talents au profit de la communauté. Même par une journée ensoleillé d’hommage, sous un chêne mémorable, les laudateurs n’ont pas échappé à cet effet béni. 

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