Il est incontestable que l’Iran fait une mauvaise querelle au Maroc. Le fond du problème, au-delà de l’affaire du Bahreïn, est que ce pays fort de son emprise régionale sur le Moyen-Orient — contrôle du Hezbollah au Liban, du Hamas à Gaza et ascendant politique en Irak— entend élargir sa projection de puissance plus loin que sa sphère «domestique» naturelle. Le vecteur religieux, le prosélytisme chiite, agissant comme une arme «nucléaire» à libération lente, avec un effet retard. Le fait de reprocher au Maroc un acte ordinaire de solidarité avec un partenaire, frère et ami, le Bahreïn en l’occurrence, ravalé par les Mollahs d’Iran au rang de province persane, est une outrecuidance diplomatique qui veut, surtout, nous informer sur le supposé nouveau statut de l’Iran. Une puissance musulmane chiite, supplantant toutes les autres, transversale, du Golfe à l’Océan Atlantique. Le traitement «singulier» réservé au Maroc par la diplomatie iranienne trouve son origine, nous semble-t-il, dans la solide légitimité religieuse de notre pays — un Etat sunnite fort, respecté et fédérateur. Le prosélytisme iranien au Maroc auquel nous avons réservé il n’y a pas si longtemps une couverture (ALMN°1773), et qui nous a valu des récriminations, hautaines et insolentes, des diplomates iraniens en mission à Rabat, participe de la même stratégie. Celle qui vise la déstabilisation d’une plate-forme continentale crédible du sunnisme vécue comme, directement, concurrente au projet impérial chiite. Surtout à la suite de l’affaiblissement conjoncturel du leadership des monarchies du Golfe, dans la région, du fait de l’aventurisme américain.