Editorial

La foi de l’investisseur

© D.R

L’acte d’investir ressemble à un acte de foi. Sa dimension quasi religieuse a été rarement signalée. Investir aujourd’hui au Maroc relève d’une forme de croyance qui confère à cette démarche une portée mystique basée sur un dogme indiscutable. J’investis parce que je crois en mon pays, en ses valeurs et en son avenir. Il n’y a pas beaucoup de place au doute dans cette attitude. Ni à la rationalité, d’ailleurs.
C’est cela le message que nous transmettent tous les jours les centaines d’investisseurs marocains qui créent de la richesse, de l’emploi et de la valeur ajoutée dans toutes les régions du pays. Ils agissent contre la morosité ambiante et le défaitisme démoralisateur entretenus par des milieux qui regrettent le temps des faveurs et l’ère du capitalisme administratif. Ils luttent contre la culture de l’échec et la propension à la léthargie favorisées par ceux qui ont choisi de placer leur argent à l’étranger et leur domicile de repli outre-mer. Ils se battent contre les blocages de toutes natures et les obstacles factices érigés par tous ceux qui considèrent que cette posture est une rente intarissable et une corruption légitimée par leur pouvoir, souvent administratif.
Investir, on le voit bien, dans cet environnement est également un acte de bravoure personnelle, un acte patriotique éminent, et une démarche citoyenne évoluée. Dès que l’investisseur annonce son projet et installe sa structure, les ennuis commencent. Tout est fait pour le dissuader, le faire douter, le casser, le criminaliser ou lui faire abandonner la partie. Comme s’il allait commettre un acte irréparable contre la nation. L’entrepreneur, avant qu’il ne démarre son activité, et après, est considéré d’emblée comme un négrier, un fraudeur potentiel du fisc, un voleur de charges sociales, un faussaire ou un escroc. Il est traité comme un suspect notoire chargé d’une forte présomption de culpabilité.
C’est ce climat qui entoure l’acte d’investir qu’il faut changer. Mais il ne faut pas se leurrer, ni la réforme de la justice et de l’administration, ni le guichet unique, ni la simplification des procédures administratives, ni le toilettage juridique de nos vieux textes ne peuvent venir formellement à bout des problèmes graves qui assaillent l’investisseur. Ce n’est pas non plus en accablant gratuitement le gouvernement ou tel ou tel ministre que l’on va y arriver. Ce dont il s’agit, en fait, c’est d’installer une vraie culture de l’investissement, une mentalité de la production et une nouvelle philosophie de production de la richesse dans notre pays.
Ce chantier-là ne se règle pas en une législature, par un seul gouvernement, ou par un seul ministère, tellement notre retard est immense, nos procédures désuètes et contre-productives, et notre culture en la matière faible. C’est l’affaire de tous et cette éducation à la création de richesses doit commencer très tôt, notamment à l’école.
De nouvelles expressions patriotiques doivent pouvoir s’exprimer dans tous les domaines. Des attitudes constructives doivent émerger chez les nouveaux acteurs de la vie économique et sociale. C’est du sort que nous ferons à tous ceux qui veulent s’investir et investir dans un Maroc prospère et solidaire que dépend notre réussite. C’est vrai, il n’y a que la foi qui sauve, alors investissons.

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