Editorial

Lectures algériennes

© D.R

Le pauvre ambassadeur du Maroc en Algérie s’est fait convoquer par les autorités de ce pays pour « justifier » un communiqué d’un parti marocain majeur et vacciné. Ce parti, un truc qui s’appelle le PLR (Parti libéral réformateur) dirigé par un non moins sympathique monsieur du nom d’Allouah, très peu de gens le connaissent chez nous. Sauf les Algériens qu’il empêche de dormir. Que dit ce parti ? Rien de spécial; il pose à sa manière le problème des frontières maroco-algériennes. C’est tout. Au bout du compte et sans chipoter au mètre carré c’est près de 38% du territoire actuel de notre voisin que notre valeureux parti met en cause avec une gourmandise non feinte. C’est l’Histoire qui enseigne cela, ce n’est pas le Bureau politique du PLR, constitué, comme chacun le sait, essentiellement de géomètres agréés, qui radote. Après cet acte de bravoure patriotique, assez bien torché, du PLR, la presse algérienne, que vous ne lisez pas, et c’est dommage pour vous, est montée, avec un sérieux remarquable, au créneau au premier sifflet. Ça a travaillé très dur sous les képis. Alors comme c’est Ramadan, un mois de charité, nous allons vous gratifier de quelques morceaux choisis, pris vraiment au hasard, qui valent leur pesant d’or dans une marée d’encre absolument délirante. Premier lâcher : « Le PLR, créé le 16 février dernier, regroupe des notables et des hommes influents du Makhzen originaires de Casablanca. Il est une scission du Parti marocain libéral (PML) de Mohamed Zaoui qui n’est autre que l’ancien ministre marocain des droits de l’Homme dans le gouvernement socialiste de Youssoufi et par conséquent proche du palais royal. » On apprend aussi, une vraie cerise, que le PLR est « proche des radicaux marocains souverainistes. » Pas de commentaire, ça ne sert à rien. Mais pour rire sérieusement en vous tapant sur les cuisses faites sortir les enfants si vous voulez rester crédible à leurs yeux. Deuxième lâcher : « Il reste qu’au Maroc, la technique, et c’en est bien une, consiste à s’enfermer dans le silence, quitte par la suite à démentir ou à déjuger l’auteur de tels propos. Sauf que cette fois, et si l’Algérie a décidé de réagir, il y a une manoeuvre sournoise, mais parfaitement coordonnée. Il y a une accumulation de propos tenus en ce sens par des personnalités que l’on dit sans lien avec le palais royal, ce qui n’est pas évidemment vrai. Chacun tente à sa manière et selon une conjoncture bien particulière de reprendre à son compte la théorie expansionniste du «Grand Maroc», laquelle n’était pas un propos d’un simple chef politique, puisque la carte tracée en ce sens figurait dans les documents officiels comme ceux de l’ancien ministère de l’Intérieur et de l’Information. Ce qui prouve que cette idée trouve au moins des relais dans les milieux officiels quand il ne s’agit pas d’appuis du même genre. » Le gars nous dit que l’Algérie a décidé de réagir contre une manoeuvre sournoise. Passe encore, ce n’est pas grave. Mais de là à faire encore retravailler Si Driss Basri alors qu’il vit dans une retraite paisible, que nous avons amplement mérité, ce n’est pas juste. Ni pour ce grand serviteur de l’État, ni pour nous-mêmes. Troisième lâcher : « Le Maroc est toujours dirigé par un régime archaïque et expansionniste et qui, de ce fait, constitue encore une menace pour la paix et la stabilité de l’Afrique du Nord. Non content de vouloir à tout prix s’emparer du Sahara-Occidental, en violation de la légalité internationale, il remet sur le tapis des revendications moyenâgeuses en vue de reconstituer ce qu’il appelle «le Grand Maroc». Pour cela, les services marocains utilisent une méthode classique qui n’a pas varié depuis la nuit des temps. Un parti monarchiste relance le débat sur les territoires marocains occupés par l’Algérie. L’information est amplifiée par la presse marocaine… » Alors là, ça suffit ! Non, non et non. Les services marocains ont évolué. Ils ne relancent plus les débats. Avec la floraison de la presse makhzénienne, néo-makhzénienne et surtout crypto-makhzénienne, ils les organisent dans une division de tâches plus complexes que ne peut le subodorer notre écrivaillon simpliste. Non, mais… Dernier lâcher : « Malheureusement, la persistance d’un comportement négatif chez les Marocains prouve encore que l’UMA est une utopie et qu’elle ne se fera pas avec une monarchie comme celle qui se trouve à Rabat. » Là, on est complètement d’accord. Nos amis algériens devront, peut-être, aller chercher leur bonheur du côté de la monarchie belge. La nôtre, ne fait pas, définitivement, leur affaire. Encore heureux… Maintenant avec ce monceau de fariboles, Taieb Fassi va convoquer qui aux Affaires étrangères? À mon avis, compte tenu de la couche, c’est Bouteflika ou rien. Au moins chez nous, notre Oujdi préféré sera en sécurité car il fait un sale temps à Alger.

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