Editorial

Monopole privé

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Sur l’affaire de la Samir, le gouvernement doit plus que jamais faire preuve d’une extrême prudence. La décision qui devrait être prise pour le retour d’une protection douanière du marché de l’importation des hydrocarbures au profit d’une société privatisée, alors que le délai de garantie de 5 ans est forclos, ne doit être entachée d’aucune suspicion. L’administration, quant à elle, est divisée. Et pour cause. Sur ce dossier, Abderrazak Mossadek, ministre des Affaires générales en charge du dossier n’a pas la même religion que Mohamed Boutaleb, ministre de l’Energie et des Mines. L’un est acquis aux arguments de la Samir, quitte à imaginer des procédures iconoclastes assez anti-libérales. L’autre veut s’en tenir scrupuleusement au texte qui a présidé à la privatisation de la Samir. Texte, par ailleurs, que ne connaît que trop bien Abderrahmane Saaïdi, actuel directeur général de la Samir, du temps où il a privatisé cette entreprise en tant que ministre des Privatisations. Tout le monde connaît l’entregent de Abderrahmane Saaïdi. Et tout le monde apprécie le sens de l’amitié de Abderrazak Mossadek. Mais de là, à stigmatiser la prudence fondée et soucieuse de l’intérêt public dont fait preuve avec responsabilité Mohamed Boutaleb est un pas qu’il serait malveillant de franchir. Dans ce secteur sensible, il ne faut pas que le talent avéré de lobbying dont tous les observateurs créditent la Samir se transforme dans la phase très critique que traverse le gouvernements Jettou en un facteur supplémentaire de déstabilisation de celui-ci. La décision que sera amené à prendre le Premier ministre est attendue. Abderrazak Mossadek, quant à lui, devra se résoudre dans cette affaire à être plus irréprochable que la femme de César. Car le credo libéral et toute la construction « politique » du gouvernement sur la transparence, la probité et l’honnêteté dans la gestion des finances publiques reposent sur le sens de la mesure, la clairvoyance et la lucidité que pourra mobiliser en dernière instance le ministre des Affaires générales. Au-delà des procès d’intention que l’on a l’habitude de nous faire sur ce sujet précis – cela fait partie de notre quotidien – une question de fond se pose avec acuité : « Est-ce que l’État marocain devra continuer à financer avec l’argent des contribuables un monopole privé dont l’importance stratégique n’est plus démontrée ? » Seule cette question vaut. Le reste relève de la polémique et de la vitalité des lobbies économiques dans un pays où le verbiage sur la mise à niveau cache mal les convulsions, de plus en plus nostalgiques et paroxystiques, d’une économie de rente. Le Maroc ancien n’est pas mort. Il bouge encore.

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