Editorial

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La réforme de la charte communale peut constituer à bien des égards la plus grande réforme de l’actuelle législature. Ce texte qui a, paradoxalement, remué moins d’air que, par exemple, la définition d’un nouveau mode de scrutin ou le réglage des passations des marchés publics, engage l’avenir de nos villes, de nos municipalités et de nos communes rurales d’une manière décisive.
Les collectivités locales sont au coeur de tous les problèmes que vit notre pays et par là, elles déterminent son évolution politique et économique. Sans véritable démocratie locale, il ne peut y avoir de développement régional ou national. Tout est lié à la base. Les communes sont omniprésentes dans les circuits d’investissement, dans tous les projets industriels et dans tous les chantiers de grande envergure. Or, l’espace politique communal est aujourd’hui très malade, rongé qu’il est par de multiples déviances et déserté par les élites locales qui en ont ont une image négative. L’élu communal lui-même est, en général, perçu négativement par ses concitoyens insatisfaits des services publics rendus et par les investisseurs qui y voient un lieu de blocage institutionnalisé, mité par une corruption organisée et systématique.
On ignore avec précision si les milliards de dirhams que brassent nos collectivités locales sont bien utilisés dans des services et des réalisations utiles et nécessaires. On ignore également si les procédures utilisées pour allouer ces fonds sont performantes, transparentes et surtout efficientes. Nous ne savons pas non plus si l’expertise actuelle de nos élus leur permet, comme beaucoup le prétendent, de gérer les affaires de la cité dans le sens de l’intérêt collectif et de l’efficacité économique. Bien sûr, sur ces questions nous avons quelques réponses arrêtées et les Marocains se sont fait depuis longtemps une idée sur la manière dont leurs villes et leurs communes sont gérées. Le bilan est passablement négatif quand il n’est pas tout simplement catastrophique.
Si Driss Jettou, le ministre de l’Intérieur, en accord avec le Premier ministre Abderrahmane Youssoufi, ont tenu à faire passer la réforme de la charte, malgré les difficultés liées au calendrier politique avant la fin de cette législature, c’est que l’urgence était manifeste. Le ministre de l’Intérieur, qui est convaincu qu’une commune peut se gérer comme une entreprise, a considéré que sans cette réforme cardinale, la pompe du développement du pays ne peut pas être amorcée. Et là, malgré les apparences, nous ne sommes plus tout à fait loin des élections communales de 2003. Cependant, il reste un problème majeur. Au-delà de l’unité retrouvée de la ville, le renforcement des prérogatives des présidents, l’abandon des communautés urbaines, le lissage et l’allègement des contrôles administratifs ou l’avènement des cours de comptes régionales, il est un fait indéniable que la démocratie marocaine, sur le plan local ou même national, n’a pas encore trouvé le personnel politique de qualité susceptible de la faire vivre.
Ce problème est déjà criard quand on voit la manière dont les investitures partisanes se font pour ces élections législatives. Il le sera encore plus pour les futures élections communales qui, naturellement, nécessitent un nombre plus important d’élus. Ce problème de fond est presque devenu une fatalité de la vie publique marocaine. Sans un véritable sursaut de la société marocaine dans son ensemble et des partis politiques censés l’encadrer, l’ambition démocratique du pays risquera d’être pour longtemps tout simplement un mirage.

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