La Conférence ministérielle euro-africaine de Rabat sur les migrations est la preuve intangible, quand la mauvaise foi, les faux calculs et le cynisme sont bannis, qu’il y a un vrai espace pour le dialogue et la coopération même sur un sujet extrêmement complexe. Le mérite de cette rencontre est de créer une réflexion solidaire et approfondie sur un des drames humains le plus violent, le moins contrôlable et le plus humiliant. L’émigration clandestine massive est un choc et un traumatisme pour l’Afrique. C’est souvent, aussi, le cas -et il faut le dire- pour les pays d’accueil qui sont débordés par une immigration à laquelle ils n’ont plus rien, ou si peu, à offrir. Par ailleurs, le temps de l’émigration est plus rapide, plus incisif et plus instantané que le temps du développement dans les pays du Sud. C’est un fait. L’approche de la question de l’émigration sous l’angle du développement économique est juste, mais elle n’est pas synchrone. C’est ce décalage qui nourrit un désespoir souvent mortel. Dans ce sens, les discours de Rabat peuvent paraître décalés, utopiques ou naïfs. Et pourtant, il faut bien, collectivement, se contraindre à mettre en place, rapidement, une politique qui, à défaut de stopper ces flux, atténuera les drames humains qu’ils occasionnent toujours.