Les jours qui avaient suivi, en février 1998, la nomination de Abderrahmane Youssoufi comme Premier ministre de l’alternance, furent très longs et difficiles – quarante jours au total. Dans les coulisses, les tractations avaient été douloureuses. En parallèle, dans une réunion épique de l’USFP à Casablanca où le débat avait – malencontreusement et insidieusement – dérapé sur la ministrabilité de quelques figures opportunes de ce parti, un militant sectaire et enthousiaste avait lancé sentencieusement : «Camarades, aucun d’entre nous ne peut prétendre à la qualité de ministre s’il n’a pas eu, à un moment donné de sa vie, la qualité sincère et avérée de détenu politique. Étant entendu, chers amis, que ceux qui sont restés le plus longtemps en prison ont plus vocation que les autres à assumer une responsabilité gouvernementale.» Tout était dit. C’était toute une ambiance. Pourquoi dire tout cela et pourquoi aujourd’hui ? La nouvelle composition du Conseil consultatif des droits de l’Homme inspire ce genre de flash-back. Additionnées, les années de prison purgées par ses membres forcent le respect et augurent – selon la logique du fameux camarade – d’une compétence solide. Après les sorties pertinentes du Conseil constitutionnel, les recommandations sérieuses de l’IER, les mises au net habituelles du CCDH, les saillies régulières de la HACA, il faut vraiment faire très attention. Un jour, on risque de se réveiller avec un vrai Etat de droit.