Désormais, chez nous, tout débat politique qui ferait l’impasse sur les questions relatives à la laïcité ou qui ne les prendrait pas suffisamment en compte serait totalement limité et contreproductif. Il n’engagerait pas l’avenir, en tout cas pas un avenir de progrès et de modernité. Continuer à «surdimensionner», ou à sublimer, la légitimité religieuse du pouvoir reviendrait, simplement, à valider – à encourager même – la démarche de tous ceux qui veulent fonder leur action politique sur l’idéologie religieuse. Tous ceux, qui frontalement ou insidieusement, de l’intérieur ou de l’extérieur de la démocratie en construction, donc du système, contestent à la monarchie marocaine sa compétence exclusive en matière de religion savent qu’ils peuvent déborder, cette même monarchie, sur sa droite – c’est-à-dire sur la thématique religieuse – , tellement la société est travaillée par l’islamisme. C’est là où la démarcation doit être faite. Tant qu’au niveau institutionnel, la séparation, même progressive, entre l’Etat et la religion n’est pas opérée de manière franche, on continuera à cause de notre «spécificité» à exposer la démocratie marocaine à un enlèvement, à un rapt, pur et simple par les forces obscurantistes. Je crois que c’est dans cette perspective «géométrique» qu’il faut resituer l’Appel aux libertés individuelles lancé récemment. Et, surtout, situer l’accueil très favorable qui lui a été réservé.