Editorial

Réformer la politique

© D.R

Est-il possible de faire une démocratie sans partis politiques ? Certains le pensent dans notre pays et font du discours anti partisan un des ressorts essentiels de leur vision d’avenir pour le Maroc. Une classe politique discréditée, des leaders dépassés par le temps, des formations politiques ressemblant à des coquilles vides, etc. Tout y passe. Y compris le fait majeur que seules la corruption et les malversations en tout genre constituent le véritable socle de notre vie partisane.
Après avoir avancé tout cela souvent avec délectation, conviction, bonne foi et pas mal d’aplomb, le problème est loin d’être réglé. Il va bien falloir, pour faire vivre notre jeune démocratie, que les partis politiques –un mal nécessaire – puissent assumer le rôle que leur confère la Constitution : organiser la pluralité de l’expression politique des Marocains et encadrer les citoyens pour améliorer la représentativité de leurs choix.
Ceci étant posé, il y a lieu de constater que personne ne souhaite vraiment la réforme de la vie politique marocaine. Les partis eux-mêmes, que la situation actuelle de déviance et d’opacité arrange pour mille mauvaises raisons. Et les pouvoirs publics que l’état de discrédit, de faiblesse et d’absence d’influence des partis arrange aussi pour autant de mauvaises raisons.
Le résultat de ce statu quo informel, on va le voir lors de l’actuelle législature quand le projet de loi sur les partis politiques sera sur le bureau du Parlement. Le consensus attendu sur cette réforme va tirer l’ensemble du projet vers le bas. Une loi a minima verra probablement le jour car elle sera le produit de marchandages justement partisans qui limiteront l’amplitude et la portée de la réforme. On ne demande pas à des formations politiques malades de se guérir elles-mêmes de maux qu’elles se complaisent pernicieusement à entretenir.
La filière parlementaire est loin d’être totalement illégitime à nos yeux, mais il aurait fallu, pour un sujet de cette importance vitale, que la volonté politique, qui exprime et met en oeuvre ce changement, soit plus puissante. Plus solennelle et plus mobilisatrice de l’opinion publique. Le message doit être fort et audible et la volonté inébranlable. Le risque est que ce projet sorte des méandres du Parlement complètement émasculé et on aura au bout du compte raté un autre rendez-vous décisif avec la réforme.
Une démocratie, ça se finance. Largement, s’il le faut. Mais dans la transparence. L’argent public, c’est-à-dire celui des contribuables, devra aller massivement si nécessaire aux partis politiques pour leur mise à niveau et leur ajustement, disons structurel, par rapport aux nécessités d’une vraie vie démocratique. Mais en contrepartie, la loi qui devra régir tout cela devra être irréprochable, claire et opposable à tous. Il est peu probable que notre Parlement, tel qu’il est, puisse accoucher aujourd’hui de quelque chose de cette nature. Ou que notre gouvernement qui fonde justement – et bizarrement – son existence sur la faillite des partis politiques puisse être mieux inspiré dans ce domaine. Alors que cette réforme est aussi décisive pour notre avenir commun que celle du Code de la famille.

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