Editorial

Un Général sur le front

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La nomination du général Hamidou Laânigri à la tête de la Direction générale de Sûreté nationale par S.M Le Roi Mohammed VI vient clore une séquence professionnelle qui a duré quatre ans. Quatre années au cours desquelles Hamidou Laânigri a habilement et professionnellement dirigé la DST – une des toutes premières nomination du nouveau règne – et a remis au travail et recentré sur son métier de base le service marocain de contre-espionnage. La DST, avec Hamidou Laânigri, a abandonné les vieilles habitudes du passé qui faisaient d’elle un service beaucoup plus préoccupé par la vie privée des citoyens, notamment les plus en vue, en montant notamment des dossiers souvent inutiles et contre-productifs. La DST a dû réapprendre à chercher l’information, à l’analyser et à la traiter selon les normes professionnelles en vigueur de par le monde. Des procédures ont été installées, un métier et des carrières revalorisés, et un souci permanent de la sécurité nationale a été entretenu. Quand la DST, avec Hamidou Laânigri, estimait qu’elle manquait d’expertise sur un point précis, le général n’hésitait pas, naturellement, à s’adresser –à ciel ouvert et sans détours caricaturaux – à des universitaires, à des journalistes ou à des intellectuels pour confronter ses analyses avec ceux qui maîtrisaient un sujet particulier. Cette méthode fort efficace et moderne a eu pour effet immédiat d’améliorer l’expertise de la DST et de la sortir du ghetto dans lequel une pratique classique, et parfois dévoyée, du métier du renseignement l’avait confinée. Elle a permis aussi de sensibiliser tous ses interlocuteurs au souci majeur de la sécurité nationale. Mais l’autre effet qui est apparu, et qui était bien évidemment prévisible, c’est que la DST et son responsable se sont exposés à une certaine forme de médiatisation nihiliste. Tous ceux, et ils sont finalement peu nombreux, que le général Hamidou Laânigri contrait, fermement, sur le terrain de la défense de la sécurité du pays se tournaient, profitant de la réelle liberté de presse que vit le Maroc, vers une presse incertaine pour battre campagne. Claude Juvenal, l’ex-directeur de l’AFP à Rabat et son affaire Adib. Ignacio Cembrero d’El Pais et Jean Pierre Tuquoi du Monde et leurs affaires vaines et multiples : le fantomatique comité des officiers libres, l’affaire Mandari, la publication du livre dérisoire « Le dernier Sultan » etc. Tous ceux-là, dans leurs menées anti-marocaines, ont eu affaire directement à Hamidou Laânigri dont ils ont toujours redouté l’efficacité et le professionnalisme. Mais, en fait, celui qui a fait une fixation absolue sur la DST est bel et bien le Prince Moulay Hicham avec son projet iconoclaste de refondation dynastique – à son avantage – sous couvert de modernisation de la monarchie. Il a trouvé, en face de lui, Hamidou Laânigri qui n’apprécie guère, par formation, ses réflexions « primogénitales ». Le général a eu droit à tous les égards du Prince par voie de presse nationale et internationale. Une thèse simple, voire simpliste, pour un Makhzénien natif : Hamidou Laânigri s’est « autonomisé » par rapport à sa hiérarchie militaire ou civile. Il fait une politique individuelle. Par conséquent, pour sauver la monarchie qui, bien évidemment, ne le contrôlerait plus ; pour sauver le processus démocratique dont il menace l’essence même ; pour sauver les libertés qu’il est en train de détruire ; il faut, bien sûr, se défaire de Hamidou Laânigri. Tout cela cumulé, en tenant compte de la force et de la violence des attaques, a finalement eu l’effet inverse. Il a fini par démontrer – ce qui n’était pas voulu bien sûr – que le général de carrière était un patriote fidèle et loyal. Il faisait son job, tout simplement. Aujourd’hui, Hamidou Laânigri, âgé de 62 ans, est appelé à agir sur un autre front. D’une autre nature. Il accomplira sans aucun doute son devoir avec autant de rigueur et de professionnalisme. Mais peut-être regrettera-t-il les plaisirs intellectuels que lui a procurés sa responsabilité à la tête de la DST en se frottant aux idées et aux hommes, aux débats et aux controverses, à l’action et à l’anticipation, aux parades et aux coups portés et finalement aux convulsions d’un pays qui fait, malgré tout, son chemin d’un pas assuré vers la modernité.

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