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Adéquation entre formation et emploi : La formation professionnelle sur la sellette

© D.R

Le taux de chômage des diplômés de l’enseigne-ment général est de 19,7% contre 25,5% pour les diplômés de la formation professionnelle et 11,2% pour les actifs occupés sans diplôme.

C’est un exercice difficile auquel s’est livré le Haut-Commissariat au Plan dans son étude sur la formation et l’emploi au Maroc. En plus clair, le HCP s’est interrogé sur l’adéquation du «plus haut diplôme obtenu» avec la profession principale exercée auprès de la population active. Pour y parvenir, les experts du HCP se sont référés au recensement de la population de 2014. Il en ressort des conclusions alarmantes. Avec cette étude le HCP met un éclairage sur certaines difficultés d’insertion sur le marché d’emploi.   

Plus de 52,2% de la population active occupée ne détiennent aucun diplôme

Les actifs chômeurs sont plus diplômés que les actifs occupés, précisent les experts du HCP. Dans le détail, plus de la moitié de la population active occupée (52,2%) sont sans diplôme contre 34,2% pour la population en chômage. Plus parlant, 47,8% parmi la première catégorie et 65,8% parmi la seconde disposent au moins du certificat primaire. Encore plus révélateur, il ressort de l’étude que le taux de chômage des diplômés de l’enseignement général est de 19,7% contre 25,5% pour les diplômés de la formation professionnelle et 11,2% pour les actifs occupés sans diplôme.

Adéquation entre le diplôme et la profession exercée

Autre conclusion révélée par les auteurs de cette étude, 9 actifs occupés sur dix sont en situation d’adéquation ou de surclassement. Dans ce sens la correspondance entre les catégories selon le diplôme et celles selon la profession exercée révèle que «45,7% de la population active occupée est en situation d’adéquation, 7,6% en situation de déclassement et 46,7% en situation de surclassement». Quant au taux de déclassement, l’analyse indique qu’il augmente en limitant la population concernée. Plus concrètement, il passe au double chez les diplômés chômeurs.

Parmi les diplômés, le taux augmente à 26,4% si l’on écarte les détenteurs du certificat du primaire ou du diplôme d’initiation professionnelle par exemple.  Pour ce qui est du surclassement, il augmente avec l’âge des actifs occupés et l’adéquation baisse d’une façon continue. De son côté, le déclassement ne commence à fléchir qu’après 30 ans, témoignant ainsi des difficultés d’insertion des jeunes générations dans le marché de l’emploi avant cet âge.

Formation professionnelle : Plus on se spécialise, plus on se déclasse !

«Plus on se spécialise en formation professionnelle, plus on se déclasse», explique le HCP. L’étude dévoile que les diplômés de formation professionnelle actifs ont tendance à être plutôt déclassés que surclassés. A titre illustratif, il en ressort un écart entre le taux de déclassement des diplômés de l’enseignement général et celui des diplômés de formation professionnelle, respectivement 11,6% pour les premiers et 33,6% pour les seconds.

Alors que le taux d’adéquation des diplômés de formation professionnelle (58,5%) est supérieur à celui des diplômés de l’enseignement général (51,4%). Les experts du HCP ont conclu que les techniciens spécialisés sont les plus en déclassement (55,8%) contre un taux d’adéquation de 44,2%. Suivis en seconde place par les techniciens et cadres moyens qui ont enregistré un taux de déclassement de 50,1% et un taux d’adéquation de 49,9%.

Le HCP ne s’est pas arrêté à ce stade, l’étude a ainsi fait ressortir huit sous-groupes de diplômes qui ont enregistré des taux de déclassement inférieurs ou égaux à la moyenne nationale. Il s’agit des diplômes supérieurs en santé, des diplômes de spécialisation en transport et télécommunications, des diplômes de qualification en transport et télécommunications, des diplômes supérieurs en services sociaux fournis à la collectivité et sciences de l’information, des diplômes de qualification en sciences sociales et humaines, des doctorats en sciences et sciences techniques, et des diplômes de qualification en services sociaux fournis à la collectivité, et des diplômes de spécialisation en sciences sociales et humaines. Autre conclusion relevée par le HCP, celle de l’adéquation par profession. Celle-ci dévoile que 72,4% des déclassés sont des «employés» ou des «manœuvres non agricoles». Autrement, les employés administratifs ont enregistré le taux de déclassement le plus élevé (39,9%). En seconde place, les personnes des services de sécurité avec une personne déclassée sur cinq (20,6%), suivies des employés de commerce (11,1%). En quatrième place, les employés de l’hôtellerie, de la restauration et assimilés (8,7%) et les employés des services personnels et domestiques (7%).

4 secteurs d’activité économique concentrent plus des 2/3 des déclassés

Par activité économique, tous les secteurs recrutent des diplômés en situation de déclassement, précise l’étude. Ainsi, le secteur des «autres services marchands» au niveau national emploie 19,6% des déclassés. En seconde position, le secteur de l’«administration publique, l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale»  embauche 17,8% des déclassés, suivi du secteur du «commerce et réparation d’automobiles et de motocycles» qui emploie 17,3% des déclassés.

Enfin, 14% de cette catégorie se trouvent dans le secteur des «industries extractives et manufacturières».

Dans ce sens, le HCP fait remarquer que «le taux de déclassement le plus élevé est enregistré dans le secteur des eaux et électricité (15,5%), avec un déclassement plus important dans le secteur de l’électricité (18%) que dans le secteur de l’eau (13,4%) et un taux d’adéquation plus important dans le second que dans le premier, avec respectivement 66,8 et 52,5%». Par ailleurs, les taux de déclassement par secteur d’activité économique des diplômés de formation professionnelle sont supérieurs à ceux des diplômés d’enseignement général, et ce quel que soit le secteur d’activité. En termes de chiffres, leurs taux de déclassement sont respectivement de 59,6% contre 13,5% dans le secteur de l’«agriculture, sylviculture et pêche», de 32,5% contre 10,9% dans le secteur des «industries extractives et manufacturières», ou encore de 37,2% contre 16,8% dans le secteur de l’«eau et l’électricité».

Quant à l’administration, l’étude du HCP dévoile que celle-ci enregistre un faible déclassement, comparativement aux autres secteurs d’activités.

Taux de chômage selon les diplômes d’enseignement général, RGPH 2014

L’analyse du HCP dévoile que «plus le diplôme de l’enseignement général est élevé plus le taux de chômage est faible».  De la licence jusqu’aux doctorat, le taux est de 18,9% pour les licenciés, 15,9% pour les diplômés du DEA/DES/Master, 7,7% pour les ingénieurs/cadres supérieurs et 3,9% pour les docteurs

Taux de chômage selon les diplômes de formation professionnelle, RGPH 2014

Le taux de chômage est en hausse pour les diplômés de la formation professionnelle, soit 21,3% pour les diplômés d’initiation professionnelle, 26,5% pour les diplômés de spécialisation professionnelle, 28,4% pour les diplômés de qualification professionnelle et 26,4% pour les techniciens spécialisés.

Evolution des parts d’adéquation, de surclassement et de déclassement selon l’âge des actifs occupés

La structure selon l’âge montre l’importance des jeunes parmi les actifs occupés avec 56,1% qui ont moins de 40 ans et 28,8% moins de 30 ans.

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Ahmed Lahlimi tire la sonnette d’alarme…

Ahmed Lahlimi,
Haut-Commissaire au Plan

Taux de chômage en hausse, faiblesse d’adaptation au marché du travail… le haut commissaire au plan a pointé du doigt le rendement externe de la formation professionnelle en qualifiant son niveau de performance de problématique aussi bien au Plan qualitatif que quantitatif, comparé à celui de l’enseignement général. Lors de la présentation de cette étude, Ahmed Lahlimi a également mis en contexte les statistiques dévoilées tout en mettant en exergue les écarts enregistrés.

«Nous savons que dans notre pays la population en âge de travailler constitue 63% de la population totale et croît annuellement de 370.000 personnes. C’est une des expressions de l’atout démographique par définition transitoire dont nous bénéficions que nous avons tout intérêt à valoriser par une politique de développement où la formation et l’emploi devraient s’harmoniser pour donner à la croissance économique la double qualité de la robustesse et de la durabilité requises pour améliorer le niveau de vie des générations actuelles et futures».

Dans son allocution, il a rappelé que le taux d’activité au Maroc ne dépasse pas 46% en 2017. Il a expliqué que ce taux est en baisse continue depuis les années 2000 où il était de 54%. Le taux d’emploi s’inscrit également dans la même tendance baissière passant de 46 à 42%. «Autant d’indicateurs qui délivrent un message préoccupant dans un contexte économique marqué par une double contrainte, celle d’une croissance en ralentissement, passant en moyenne annuelle de 5% entre 2000 et 2008 à 3,7% en 2009-2017 et une baisse de son contenu en emplois de 30.000 postes en moyenne par unité de croissance à 10.500 entre les deux périodes, portant les taux de chômage et de sous-emploi à des niveaux chroniquement élevés», précise-t-il.

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