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Démasqué deux ans après son crime

© D.R

Qui, au douar Tafrante, province de Taounate, n’a pas connu et apprécié Abdeslam? Tout le monde, des enfants aux gens âgés, se souvient de lui, de son sérieux, son humour et son dévouement aux autres… Abdeslam le marchand pas comme les autres, serviable et généreux au point que tout le monde pensait d’abord à lui en cas de besoin. Qu’il s’agisse de fournir de la marchandise à crédit ou de prêter de l’argent, Abdeslam était connu pour sa disponibilité et son sens de l’amitié. Héla, ce temps-là est bien fini et Abdeslam n’est plus, pour ceux qui passent désormais devant sa boutique fermée, qu’une image du passé. Car Abdeslam n’est plus, il a été assassiné.
Son décès remonte à deux ans. C’était à l’aube du jeudi 4 novembre 2004. Abdeslam avait été découvert gisant dans une mare de sang, juste à l’entrée de son local commercial, une blessure au niveau de sa tête et une seconde au niveau de sa nuque. Ce jour tragique est encore gravé dans toutes les mémoires. Au début, personne n’avait voulu croire à sa mort.
Et puis l’enquête avait commencé. Des éléments de la gendarmerie royale qui s’étaient rendus sur les lieux avaient constaté que la porte du magasin d’Abdeslam était ouverte et que le tiroir-caisse était vide. Ils en avaient conclu à un crime crapuleux. Mais au fil des jours, l’enquête n’avait abouti à rien. Les investigations s’étaient donc intensifiées. Toujours en vain. Aucun indice, ni le moindre soupçon qui aurait permis aux gendarmes de remonter la piste jusqu’à l’assassin. Les jours étaient devenus des semaines, puis des mois. Et toujours rien. Une année, puis deux passèrent, sans que l’enquête avance d’un pas. La gendarmerie passa finalement le relais à la police judiciaire de Fès.
Pour leur part, les habitants du douar Tafrante en avaient conclu que l’affaire a été classée et que l’auteur du crime continuerait à jouir de l’impunité. Avec un malaise profond dû à une suspicion généralisée : après tout, le meurtrier faisait partie de la communauté.
L’entrée en action des enquêteurs de la PJ de Fès, qui rouvrent le dossier, sont donc un baume au cœur des gens du douar. Ils commencent par constater que les  investigations policières ciblent surtout les délinquants et les chômeurs.
Pour ce qui est de Larbi, les enquêteurs de la PJ ne se sont pas intéressés au départ à lui, bien qu’il soit au chômage depuis longtemps. Jusqu’à ce qu’il apprennent que Larbi avait disparu durant une vingtaine de jours, juste au lendemain du meurtre d’Abdeslam et que sa situation matérielle s’était nettement améliorée à son retour. Larbi aurait-il décroché un travail dans une autre ville ? Si oui, vingt jours sont-ils suffisants pour amasser une grosse somme d’argent ? Les policiers interpellent donc Larbi et le soumettent à un interrogatoire serré. Au début, Larbi nie avoir tué Abdeslam. Mais pas facile pour lui de tenir une position fragile de dénégation. Pressé de questions, il avouera finalement être l’auteur du crime et révèlera ses motivations.
Père de trois enfants et chômeur, Larbi n’arrivait que difficilement à gagner sa vie. Il ne savait plus à quel saint se vouer pour subvenir aux besoins de sa famille dont les demandes s’accroissaient régulièrement. Au point d’envisager le recours au vol comme seule solution.
Nous sommes au matin du jeudi 4 novembre 2004. Quelques instants avant l’appel de la prière d’Assobh, Larbi sort de chez lui, armé d’un coutelas et se dirige vers la boutique d’Abdeslam. Il le trouve sur le point de se rendre à la mosquée. Il lui demande de lui donner à crédit un paquet de cigarettes. Abdeslam, surpris par cette démarche suspecte, ne cache pas sa méfiance. Il répond donc à Larbi qu’il n’a pas le temps de le servir, qu’il est en retard pour aller prier. Mais il n’aura pas le temps de prier son voisin de lui libérer le chemin. L’autre a déjà sorti son couteau dont il porte deux coups violents à la tête et à la nuque du commerçant qui s’effondre dans une mare de sang : les coups étaient fatals.
Abdeslam hors d’état de résister, Larbi se jette sur le tiroir-caisse qui contient 10 000 DH. Il s’empare de l’argent et prend aussitôt le chemin de Tanger, où il passe une vingtaine de jours avant de regagner son douar. Jusqu’à ce que, deux ans après…
Au mois de novembre dernier, Larbi a été traduit devant la Cour d’appel de Fès. Quant à sa femme et à ses trois enfants, ils ont encore du mal à admettre la réalité du crime commis et de la sanction qui s’est abattue sur lui.

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