Faits-Divers

Des agents judiciaires devant la justice

© D.R

Dernière semaine du mois de mai 2006. Mouhcine s’attablait dans un café de Rabat quand son téléphone portable a sonné. Qui est à l’autre bout du fil ? C’est l’avocat de son ami qui l’appelle de la capitale ismaélite. « L’avocat de l’épouse de ton ami vous demande d’entreprendre rapidement les procédures de la répudiation …Il vous dit que sa cliente ne peut plus attendre », lui dit l’avocat.
Mais qu’est-ce que Mouhcine a eu avec l’affaire de répudiation entre son ami et son épouse ?
Ne pouvant plus continuer ensemble, les deux époux se sont adressé à la justice pour avoir l’autorisation de divorce. Cependant, l’ami est un ressortissant marocain en Espagne qui ne pouvait pas attendre juqu’à ce que la procédure s’achève et la décision de la Cour soit prise. Il devait y retourner le plus tôt possible.
Le travail l’appelle. Il a fait alors une procuration à Mouhcine qui se déplaçait de Rabat à Meknès pour s’enquérir de l’état d’avancement du dossier. Et lorsqu’il a reçu la communication téléphonique de l’avocat, il fut surpris. Pourquoi ? Parce qu’il a déjà reçu le jugement du tribunal autorisant le divorce, numéroté et signé par le juge, ainsi qu’il a déjà envoyé à son ami l’acte de divorce. Comment les a-t-il reçus ? Par quel moyen ? Des interrogations qui ont hanté l’esprit de l’avocat qui lui a expliqué que le tribunal n’a pas encore rendu son jugement. Étrange ! Et les documents que Mouhcine avait reçus de chez deux fonctionnaires du tribunal de première instance de Meknès ? Sont-ils authentiques ou falsifiés ? L’avocat a demandé à Mouhcine de se rencontrer le lendemain à Meknès.
C’était dans un café de la ville ismaélite que l’avocat et Mouhcine se sont rencontrés. Mouhcine a tous expliqué à l’avocat : au hall de tribunal de première instance de Meknès, il a été abordé par le fonctionnaire, L’husseïne. Après une brève conversation, celui-ci lui a expliqué qu’il détient la canne magique pour achever dans un temps record la procédure relative au jugement de divorce. Et ce, contre cinq mille dirhams. « Je ne suis qu’un intermédiaire…C’est mon ami, Abdellah, fonctionnaire au tribunal de la famille qui va veiller sur la procédure », lui a-t-il ajouté. Mouhcine a rencontré Abdellah. Ce dernier lui a demandé une avance de deux mille dirhams. Et tous les trois ont fixé un autre rendez-vous en fin de semaine. Mouhcine a rejoint les deux fonctionnaires à Meknès. Ils lui ont remis un jugement d’autorisation de divorce, sous le numéro (…), objet du dossier n° (…), daté le 25 mai 2005. Deux jours plus tard, L’husseïne a accompagné Mouhcine chez un Adoul qui doit dresser l’acte de divorce.
En examinant les documents, l’Adoul a remarqué que le divorce a eu lieu avant la consommation du mariage. Et en conséquence, le jugement d’autorisation de divorce oblige, selon la loi, la présence de l’épouse lors de la rédaction de l’acte du mariage. L’husseïne a récupéré le jugement portant l’expression « la présence de l’époux » à la place de la « présence de l’épouse » et un cachet sur la nouvelle expression. Mais, l’Adoul leur a fait une seconde remarque ; le jugement d’autorisation de divorce signale que la dot était de 15 mille dirhams, contrairement à l’acte du mariage qui souligne que la dot était de 7.500 dirhams. « Je crois qu’il ne s’agit que d’une erreur du juge qui a rendu le jugement…On va lui demander de le corriger », dit le fonctionnaire au Adoul. Ce dernier a décidé de dresser l’acte de divorce, à condition qu’ils lui portent ultérieurement le jugement sans erreur.
En entendant cela, l’avocat a dit à Mouhcine que :"l’affaire est très louche". Ils ont alors avisé la police et lui ont tendu un piège.
Apprenant les soupçons de l’avocat, L’husseïne a déchiré la page contenant les fausses informations dans le dossier des autorisations de divorce, ainsi qu’une page du dossier relatif aux inscriptions des actes de divorce. Et sans vergogne, il a expliqué à Mouhcine que cette destruction de preuves lui a coûté 1.500 dirhams.
Quand Mouhcine s’est apprêté à lui remettre le pot-de-vin dans un café de Meknès, la police est intervenue. Les deux fonctionnaires ont été traduits devant la Cour d’appel de Meknès, poursuivis pour falsifications des écritures officielles, usage de cachet authentique pour la falsification, destruction de dossiers officiels et corruption.

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