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1996, l’année de la campagne d’assainissement

© D.R

C’est l’un des dossiers qui ont fait couler beaucoup d’encre au Maroc. Une affaire qui a duré presque deux ans, mais qui ne risque pas d’être oubliée facilement. Il s’agit de la campagne d’assainissement qui avait été menée par les autorités, il y a presque neuf ans, contre la contrebande, la corruption et toutes les opérations de fraude liées au monde des affaires.
C’était en janvier 1996. Une opération de grande envergure avait été initiée par les ministères de l’Intérieur et de la Justice contre des hommes d’affaires accusés de trafics de tout genre. Mais la campagne ne touchera pas uniquement aux entrepreneurs. Des complicités au sein de l’appareil administratif allaient être révélées au grand jour notamment dans l’administration générale de la Douane.
Le but affiché de cette campagne était d’assainir le milieu des affaires et de combattre la corruption au Maroc. Un objectif qui est extrêmement important dans un pays en développement et qui veut construire un avenir meilleur. Mais au-delà de cet aspect idéal, la campagne avait des objectifs inavoués où des intérêts personnels et des règlements de comptes allaient être passés sous couvert de l’assainissement.
La campagne démarra avec des opérations précises, ciblées et bien préparées avant de perdre sa rigueur et d’entrer dans une phase d’incertitude et d’improvisation, voire même d’injustice. Aussi, c’est à Casablanca, capitale économique du Royaume, que les premières opérations avaient été enregistrées.
A Derb Omar, où se concentre la majorité des grossistes de la ville, les descentes policières deviennent, du jour au lendemain, un exercice quotidien et les arrestations se multiplient dans les rangs des commerçants au point que nul ne se sentait en sécurité. Parmi les personnes appréhendées dans le cadre des ces opérations, certaines figuraient parmi les notabilités commerciales de la ville. Mais l’ampleur des fraudes enregistrées dans leurs cas fera en sorte que leurs noms demeureront associés à la campagne d’assainissement de 1996.
C’est le cas notamment de Simon Chetrit, un des plus importants importateurs de tissus de la capitale économique. La liste des délits qui lui avaient été imputés est des plus longues. Contrebande, corruption, fraude dans le système d’admission temporaire communément appelé le régime des « AT » ne sont que quelques infractions à la loi pour lesquelles, il allait être poursuivi.
Le procès de Simon et de David, son fils, allait durer à peine quelques mois. Le verdict définitif, après épuisement de tous les recours, allait être une condamnation à une peine de prison ferme de trois ans chacun ainsi qu’une amende de presque 80 millions de Dhs. Mais les Chetrit ne seront pas les seuls accusés de ce dossier. Dans leur trafic en matière d’admission temporaire, ils avaient des complices. Il s’agit de cadres de la douane sans la complicité desquels, ils n’auraient jamais pu mener leurs opérations frauduleuses.
Ainsi, dans le cadre de cette campagne d’assainissement, plusieurs douaniers seront condamnés. Parmi ces derniers, deux ex-directeurs généraux, Ali Amor et Hammad Jaï Hokaïmi, ainsi qu’Ahmed Hamza, un ex-sous directeur de la douane devenu membre de la Commission préfectorale de lutte contre la contrebande. Les deux ex-directeurs seront condamnés chacun à un an de prison ferme. Ce jugement sera approuvé en appel. La campagne sera marquée aussi par une autre affaire. Mais cette dernière sera marquée d’une empreinte politique, étant donné que la personne poursuivie était membre de la Chambre des représentants. Député sous la bannière de l’Union Constitutionnelle (UC), Mohamed Zahraoui a été arrêté suite à la découverte dans ses entrepôts d’un stock de bière frelatée en provenance de Bulgarie et qu’il s’apprêtait à écouler sur le marché national.
Le député sera condamné à une peine d’emprisonnement d’un an ferme que le transporteur connu purgera malgré toutes ses tentatives pour y échapper via le recours aux interventions des personnalités politiques de son parti.
Mais la campagne connaîtra aussi des dossiers qui allaient porter atteinte à l’image de la Justice marocaine. Parmi ces affaires, celle du pharmacien Moncef Benabderazik est celle qui illustre le plus les risques de dérive qui existent dans de telles opérations. Poursuivi pour importation illégale de sang dont la qualité avait été considérée comme étant douteuse, ce pharmacien allait être condamné à une peine d’emprisonnement de neuf ans ferme.
Enfin, il est à rappeler que, deux ans plus tard, toutes les personnes poursuivies dans le cadre de cette fameuse campagne d’assainissement allaient bénéficier de la grâce royale. Une mesure qui permettra de clore un dossier des plus ambigus des dernières années.

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