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Abdellah Rami : «Cheikh Yassine adopte la politique de la confrontation depuis le début»

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ALM : Pourquoi Cheikh Yassine cherche-t-il la confrontation avec l’Etat?
Abdellah Rami : Cheikh Yassine a tracé un projet idéologique contradictoire par rapport au régime marocain. Aujourd’hui, le Cheikh veut réaliser son projet, mais il se retrouve automatiquement en confrontation avec le système existant. Cheikh Yassine n’a pas besoin de chercher cette confrontation. Au contraire, le cheikh adopte la politique de la confrontation depuis le début puisque son projet repose essentiellement sur des fondements «putschistes» et se présente comme alternative.

Qu’est-ce qui explique ce timing choisi par la Jamaâ?
Je dirai en un seul mot, qu’il s’agit d’«une opportunité» que la Jamaâ a sitôt saisie. Il est clair que le monde arabe passe par d’importants changements politiques. De même, nous constatons une vague continue de protestations de par le monde, soutenue par des moyens modernes de communication. Ce qui est sûr, Al Adl Wal Ihssane voit en cette situation une occasion pour atteindre ses objectifs. En plus, cette circonstance a permis à la Jamaâ de se débarrasser du complexe de la «vision 2006» qui a tant embarrassé le leadership de la Jamaâ et a ébranlé sa position face à l’opinion publique nationale et internationale. Ainsi la dynamique politique que connaît le monde arabe constitue un rebond pour Al Adl Wal Ihssane afin de revenir au-devant de la scène politique. Notons que c’est une nouvelle stratégie adoptée par la Jamaâ.

Al Adl Wal Ihssane manipule le 20 février. Qu’en pensez-vous?
Je dirai qu’il s’agit plutôt d’une coordination prudente et d’un échange d’intérêts entre les différentes composantes du mouvement du 20 février. Al Adl Wal Ihssane tente d’imposer sa présence progressivement au sein de ce mouvement. Et ce, en fonction de ses intérêts ainsi que de son analyse des circonstances engendrées par la dynamique du Mouvement du 20 février. Il ne faut pas oublier qu’Al Adl Wal Ihssane est la composante la plus puissante et la plus active au sein du Mouvement du 20 février. Selon les calculs politiques, Al Adl Wal Ihssane estime qu’il n’est pas dans son intérêt d’imposer son contrôle au sein du mouvement, car cela rendra sa confrontation avec l’Etat plus directe et plus visible aux yeux de la communauté internationale qui a peur de la montée de l’islam politique radical. Il faut dire que la tactique adliste est inspirée de l’expérience des Frères musulmans en Egypte. Entre-temps, Al Adl Wal Ihssane préfère rester à l’ombre pour profiter de la couverture médiatique et du soutien international en matière des droits de l’Homme. De même, la Jamaâ tend à donner l’impression qu’elle fait partie du mouvement populaire civile, cachant ainsi son background islamiste. Il est à noter que les composantes gauchistes radicales et les jeunes du 20 février savent pertinemment l’agenda de la Jamaâ, ce qui justifie la prudence du clan Al Adl Wal Ihssane.

Comment l’Etat doit-il gérer cette confrontation ?
Au fait, je ne suis pas en mesure de dicter à l’Etat ce qu’il doit faire. Mais d’un point de vue analytique, on peut déduire que l’Etat lutte sur deux fronts. D’une part, l’Etat se trouve dans une bataille d’émotions et de mentalités qui ne cessent de changer surtout à la lumière des mutations arabes. Dans ce sens, l’Etat a présenté un projet de réforme. De même, l’Etat fait de plus en plus attention à sa démarche sécuritaire et œuvre de tout son possible pour maîtriser la situation et garder le contrôle. D’autre part, l’Etat est de nouveau en confrontation avec Al Adl Wal Ihssane, mais cette fois-ci dans des conditions différentes. Ainsi, l’Etat cherche à dévoiler les intentions de la Jamaâ et à dissocier son agenda du mouvement populaire réformiste.

Comment est perçu le projet de société d’Al Adl Wal Ihssane?
On a besoin d’établir un sondage populaire à propos du projet de société d’Al Adl Wal Ihssane. L’élite, quant à elle, manifeste unanimement sa crainte par rapport au projet d’Al Adl Wal Ihssane. Ceci est apparent à travers le refus de plusieurs factions politiques et islamistes de la charte proposée auparavant par Al Adl Wal Ihssane pour la création d’un front uni. De toutes les manières, l’idéologie d’Al Adl Wal Ihssane est désormais le sujet d’interrogation du clan 20 février. Bien qu’il a saisi l’occasion de la mobilité sociale, Al Adl Wal Ihssane est sujet à une réelle pression pour opérer des changements dans son idéologie.

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