L’accord d’Agadir permettra l’ouverture de marchés de près de 100 millions de consommateurs et la promotion des flux d’investissement en provenance aussi bien des pays membres que des pays tiers.
Au-delà de ce schéma optimiste, la réalité sur le terrain (marocain) est moins réjouissante. En effet, et depuis la signature de cet accord, le 25 février dernier, les protestations fusent chez plusieurs opérateurs économiques.
Nombreux ont fustigé la non-consultation sur le contenu de l’accord, l’absence de visibilité quant à l’impact du démantèlement sur certains secteurs fragiles…
Si les retombées positives de cet accord ne sont pas encore claires, les menaces, elles, se précisent. Et plusieurs secteurs de l’économie marocaine risquent d’en pâtir sérieusement. C’est le cas par exemple de l’industrie du ciment. Et pour cause : le ciment tunisien coûte deux fois moins cher que son homologue marocain. Pour d’autres secteurs, l’accord d’Agadir n’offre tout simplement aucun avantage pour les industriels marocains, comme c’est le cas pour l’industrie pharmaceutique. L’explication réside dans le fait qu’en ce qui concerne les génériques par exemple, les brevets délivrés par les multinationales limitent les capacités d’exportation. Une question se pose cependant: le risque est-il exagéré ? Certains observateurs l’affirment en s’appuyant sur le fait que le Maroc est déjà lié à chacun de ces 3 pays (la Tunisie, la Jordanie et l’Egypte) par un accord de libre-échange bilatéral. D’autant plus que malgré l’existence de ces accords, le taux des échanges commerciaux entre ces pays est resté relativement faible. Sachant que la plupart des pays arabes produisent des produits concurrentiels, les économies de ces pays sont de toute façon condamnées à emprunter un processus de l’intégration des marchés qui va probablement s’étaler sur une dizaine d’années. L’hypothétique avantage économique que peut tirer le Maroc de cet accord reste également tributaire de la réalisation d’une approche commerciale cohérente des exportations marocaines vers les marchés de la région. Une approche qui, au passage, n’existe toujours pas. Globalement, l’accord d’Agadir, comme tout accord de libre-échange, met en relief la question de la mise à niveau de l’économie nationale.
Dans le cas du ciment marocain, qui est un gros consommateur d’énergie, une rapide mise à niveau s’avère inéluctable dans un pays qui compte un déficit de 4 millions de logements. Faute de quoi, les répercusions de cet accord risquent de peser lourd sur un pan entier de l’économie nationale.