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«Al Adl Wal Ihssane veut faire chanter l’état»

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ALM : Al Adl Wal Ihssane fait acte ces derniers jours d’un activisme peu ordinaire. Pourquoi cette association islamiste cherche-t-elle aujourd’hui l’escalade avec le pouvoir ?
Samir Abou Al Kassem : Al Adl Wal Ihssane a l’habitude d’entreprendre un certain nombre d’actions politiques en liaison avec les échéances les plus importantes de l’agenda politique national. Son activisme aujourd’hui prend une dimension politique qui n’a rien à voir avec les slogans qu’elle prétend puiser dans un référentiel islamique. En cela, elle ne se démarque pas des autres mouvements politiques, de quelque bord qu’ils se revendiquent, Droite ou Gauche, sachant bien que la nature de l’idéologie de la Jamaâ ne définit pas les formes, ou les formules, de son action politique. Partant de là, tous les acteurs politiques sont appelés à être vigilants par rapport à ce genre d’activisme susceptible de nourrir davantage les facteurs d’intégrisme dans la société marocaine, d’autant plus que les grands slogans arborés par cette association prêchent « le jihad » et gardent pour objectif « l’islamisation de l’Etat et de la société ».
L’activisme  de la Jamaâ intervient à l’approche des échéances de 2007, et son enjeu électoraliste n’est donc pas à démontrer. Seulement, il y a lieu de se poser la question si cet activisme sera mis sur le compte du bilan politique, de cette association ou profitera au Parti de la justice et du développement (PJD) comme c’était le cas lors des élections de 2002-2003. En cas de boycott par la Jamaâ des prochaines élections, il ne fait pas de doute que les voix de ses sympathisants seront mises au profit du PJD, ce qui triomphera certainement à l’intégrisme qui en sortira vainqueur.

Quel danger représente une manifestation comme celle des conseils dits d’orientation, à l’origine de l’escalade entre Al Adl Wal Ihssane et les autorités ?
Ces conseils d’orientation ne sont pas ouverts au public, ils sont par contre enfermés sur eux-mêmes. Ils sont ainsi susceptibles de créer un fossé entre les citoyens et la société dans laquelle ils vivent, au risque de les couper de leur environnement naturel. Et puis, quel genre de savoir est prodigué au public ciblé ? Ces conseils ne visent-ils pas à développer en eux les graines de l’intégrisme, au point de rejeter le principe de la différence avec ceux qui sont d’un avis différent. D’où il ressort que ces conseils sont loin de participer à l’encadrement sain des citoyens, comme cela doit être le cas de tout mouvement politique qui se respecte. Autrement dit, au lieu de jouer un rôle dans l’éducation et la mobilisation du citoyen de manière à le rendre utile à la société, ce genre de manifestations se transforme en vecteur incitatif à la subversion contre l’Etat et la société. D’où le danger de pareilles manifestations.

Croyez-vous que l’approche sécuritaire est suffisante pour contrer ce danger ? Les partis politiques jouent-ils le rôle qui leur échoit pour faire face à la littérature intégriste ?
Je suis sûr que le pouvoir, en tant qu’acteur politique, ne parie pas uniquement que sur l’approche sécuritaire pour faire front au danger intégriste. Il y a lieu de constater qu’il y a d’autres formes d’approches de ce danger. J’en veux pour exemple l’approche judiciaire qui se base sur la révision de toutes les lois qui organisaient les rapports au sein de l’Etat et la société. Il y a également l’approche pédagogique qui se traduit par les réformes introduites dans le système éducatif national. Cela dit, l’approche sécuritaire garde une importance capitale. Il convient aujourd’hui de l’approfondir comme il faut, sans oublier le rôle que les partis politiques peuvent jouer, sinon dans l’éradication du danger intégriste, du moins dans sa limitation. Au-delà des partis politiques, les organisations de la société civile sont invitées à s’impliquer dans ce combat en oeuvrant à encadrer les citoyens de manière à leur éviter de succomber à la tentation de l’idéologie intégriste.

Que pensez-vous de la création récemment d’un courant politique au sein d’Ald Adl Wal Ihssan, en l’occurrence l’Alliance dite de la fraternité ?
Cet acte vise essentiellement à faire croire qu’il y a « une démocratie interne » au sein d’Al Adl Wal Ihssane. C’est une forme de propagande qui a pour objectif de donner le sentiment que la différence, et par conséquence le pluralisme, existe au sein de cette association, alors que cette dernière est dirigée selon une discipline martiale basée sur l’allégeance absolue à son guide.

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