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Attention école !

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Le lundi 6 octobre, au lendemain de la célébration de la journée mondiale des enseignants, une institutrice d’une école primaire de Casablanca a jeté deux de ses élèves par la fenêtre d’une classe située au premier étage dont l’un a été grièvement blessé et évacué d’urgence à l’hôpital. L’institutrice ayant à son actif près de vingt-cinq ans de service dans l’enseignement, souffre, affirment ses collègues, de troubles psychiques. Elle aurait même présenté à maintes reprises à la direction de l’école des certificats médicaux attestant de ses problèmes psychologiques. Mise en état d’arrestation par la police judiciaire qui a immédiatement ouvert une enquête sur l’affaire, l’institutrice a été suspendue de ses fonctions jusqu’à nouvel ordre, selon le directeur de l’établissement scolaire où elle exerce. Cette information, classée par certains dans le volet des faits divers pouvant arriver n’importe où à travers le monde, doit toutefois inciter la société à se poser des questions sur la sécurité de nos écoles et les conditions psychosociales qui entourent l’enseignement dans notre pays. En d’autres termes, nos enfants sont-ils en sécurité à l’école ? Une question légitime que tous les parents se posent chaque jour en déposant leurs enfants à l’école, mais qui devient une source de préoccupation majeure à l’occasion de tels incidents. Ainsi, ce qui est arrivé lundi dernier est de nature à rajouter une nouvelle angoisse chez tous les parents à toutes celles qui les préoccupent quotidiennement. La défenestration est désormais un nouveau risque qui vient s’ajouter à une liste assez longue. Cette préoccupation, qui frôle d’ailleurs la phobie chez certains parents, est en fait due à un constat objectif : la violence est en train de s’installer progressivement comme une donnée structurelle dans nos écoles. Élèves et membres du corps enseignant sont tous concernés par ce phénomène qui fait des victimes de part et d’autre. Ainsi, les enseignants se plaignent de la montée de l’agressivité chez les élèves qui se manifestent souvent par des réactions violentes à l’encontre de leurs professeurs. De même que le comportement de certains enseignants demeure inapproprié envers leurs élèves sachant que l’une des missions les plus élémentaires de l’enseignant est de protéger ses élèves comme le précise la « Recommandation internationale de 1966 relative à la condition du personnel enseignant ». L’article 69 de ce texte établi par l’UNESCO stipule que : « Étant entendu que les enseignants devraient veiller avec le plus grand soin à éviter tout accident à leurs élèves, les employeurs des enseignants devraient les protéger contre le risque d’avoir à payer des dommages-intérêts si des élèves sont victimes d’accidents, à l’école même ou au cours d’activités scolaires à l’extérieur de l’école ». Or, la situation de stress qui prévaut dans les établissements scolaires provoquée notamment par le surpeuplement des classes (dans certaines écoles primaires on enregistre une moyenne de cinquante élèves par classe) et l’absence des conditions de travail adéquates fait en sorte qu’il y ait toujours une ambiance de tension qui peut facilement tourner au drame comme ce fut le cas dans l’affaire de l’institutrice. Mais la violence n’est pas l’unique problème d’insécurité qui existe dans nos écoles. En fait, il existe plusieurs volets qui nécessitent une réflexion profonde dont l’état de nos écoles, l’assurance scolaire, les associations de parents d’élèves et l’absence de contrôle régulier de la part des administrations responsables. S’agissant de l’état lamentable de nos écoles, il est à signaler que le volet « entretien » semble avoir été définitivement effacé des préoccupations du ministère concerné. Ainsi, l’on trouve des écoles où les classes ne remplissent aucune condition de travail : vitres cassées, absence de lumière, tables cassées et autres. Une situation qui ne fait qu’augmenter les risques d’accidents. Pour ce qui est des assurances, l’on doit se demander sur les raisons de l’existence de cette redevance que les parents sont tenus de payer à l’occasion de chaque rentrée scolaire. Car, à quoi sert-il de payer une assurance si, à l’occasion d’un accident, la direction de l’école ne fait qu’évacuer l’élève vers le service des urgences de l’hôpital public. Sans oublier que dans le cas de blessures légères, on se contente d’envoyer l’élève chez ses parents. Or, l’assurance est censée couvrir tous les frais engendrés par l’accident subi par l’élève au sein de l’école allant des dépenses pour les soins aux dédommagements pour les traumatismes psychiques et leurs séquelles tant de l’enfant que de ses parents. À ce niveau, il est tout à fait légitime de remettre en question le rôle des associations de parents d’élèves et qui ont été détournées de leur véritable mission. Au lieu d’être des associés des directions des écoles pour en assurer la bonne marche dans un cadre de concertation et de solidarité, ces associations ont été réduites à des sources d’argent qui est mis à la disposition des responsables des écoles sans aucun contrôle. Il suffirait d’exiger un audit des comptes de la majorité des associations de parents d’élèves pour se rendre compte que les sommes réunies chaque année ne sont nullement employées là où elles doivent l’être à savoir améliorer le cadre de travail des écoles et investir dans tout ce qui est de nature à assurer une meilleure sécurisation des écoles. Enfin, l’absence de conseillers psychologiques dans les écoles est un problème auquel il faut remédier. Car, dans une microsociété comme l’école, il est tout à fait normal qu’il y ait des parfois des tensions, il est donc nécessaire qu’il y ait au moins un cadre spécialisé pour qu’il puisse intervenir à temps pour éviter d’arriver à des situations aussi graves que la défenestration à laquelle ont assisté les élèves de l’école casablancaise, lundi dernier.

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