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«Aucun monopole ne doit plus être accordé»

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ALM : Les Assises du tourisme débutent ce jeudi. Quel est votre regard sur l’avenir du tourisme au Maroc ?
Abdelhadi Alami : Comme je l’ai expliqué longuement dans mon dernier ouvrage, il n’y a pas de recette miracle pour le développement économique, dans le tourisme ou ailleurs. Il faut souvent tâtonner, corriger, ajuster et persévérer. Pour moi, les planificateurs de l’Accord-cadre se doivent de garder l’homme au centre de leurs projets et leurs préoccupations. L’homme constitue le capital le plus précieux de toute entreprise. Ensuite, la mise à plat de l’action du comité stratégique du Tourisme s’impose à l’évidence puisqu’à l’automne 2003, les résultats enregistrés frappent par leur modestie. Cela soulève des questions tenant à l’importance de l’organisation. Le concept de la croissance à deux chiffres du tourisme est si important pour le Maroc que les moyens à réunir et à mettre en oeuvre doivent être conséquents. Mais il arrive que le savoir-faire, lié à des moyens modestes, peut pallier bien des carences. Autre question que je me pose : n’est-il pas temps de mobiliser tout le département du Plan en tant que structure administrative de support et de le mettre à la disposition de la Haute autorité du tourisme qu’il faut, bien entendu, créer préalablement ?
La libéralisation du ciel marocain est l’un des dossiers attendus. Quel est votre regard sur ce sujet ?
C’est assurément à propos de ce dossier que l’on peut établir la volonté réformatrice des pouvoirs publics : oui ou non, vont-ils trancher dans ce domaine ? Il est désormais acquis qu’un système de transport aérien a fait son temps depuis des années et qu’un autre régime plus libéral doit s’y substituer. Si l’on veut donner des chances sérieuses à la vision 2010, la libéralisation du transport aérien est à engager. Pour moi, sans que cela ne soit brutal, il convint de prévoir d’ici la fin de l’année 2004 au plus tard, la levée des mesures restrictives qui subsistent encore dans ce secteur. Des mesures d’accompagnement étudiées sont à mettre en chantier. L’intérêt est que les parties intéressées, la RAM comme les autres compagnies, puissent de leur côté se préparer à cette nouvelle situation dans des conditions optimales. Le credo de cette réforme est simple : aucun monopole d’aucune sorte ne doit plus être accordé à quiconque. C’est le principe d’égalité qui doit prévaloir entre la RAM et toutes les autres compagnies. À mon sens, là réside une révision essentielle qu’il faut opérer. Elle tourne désormais le dos à une culture « rentière » qui protège les carrières de certains et les intérêts d’autres. Elle doit, en tout cas, rompre avec les attitudes rigides et dogmatiques qui voient dans le maintien de la situation désastreuse actuelle sous le couvert de la RAM l’expression dont on ne sait trop quel patriotisme de mauvais aloi. Elle doit consacrer enfin, l’adhésion aux règles de la bonne gestion et aux exigences de la rationalité économique.
Une réflexion au sujet du financement des investissements est aussi escomptée. Partant de votre expérience de ce domaine, quelle est votre vision ?
Le fait que les problèmes rencontrés par les pouvoirs publics pour mettre en place une politique durable d’incitation à l’investissement ne soient pas encore totalement résolus, favorise la persistance et l’acuité de la problématique de l’investissement touristique comme piste d’avenir.
Seulement, une nouvelle politique de financement est de nature à stimuler ce secteur de manière durable. Il ne s’agit pas de faire «des cadeaux aux opérateurs» mais de mettre sur pied uns système cohérent susceptible d’encourager sérieusement et durablement l’investissement. Nous devons prendre la peine de voir et d’examiner ce qu’ont fait à cet égard des grands pays touristiques de la région et ce qu’ils continuent encore à mettre en oeuvre dans cette perspective. Il est cependant nécessaire de bien retenir cette leçon : la création d’un environnement juridique, réglementaire et financier attractif a favorisé chez eux l’expansion de l’industrie touristique. Et tant que cet acquis n’aura pas été réalisé et conforté au Maroc, il n’est pas réaliste d’escompter atteindre les objectifs liés à la vision 2010.
Que répondez-vous à la question : quel tourisme pour quel Maroc ?
Par le passé, on faisait du tourisme comme on aurait pu faire autre chose, avec des intuitions, des élans de quelques professionnels qui avaient le «sacré» . mais la somme de ces initiatives se traduisent-elles, au plan national, par l’affirmation d’une véritable stratégie ? Rien n’est moins sûr, parce que l’on n e s’est pas préoccupé, au fond, d’évaluer la nature et la dimension de l’industrie du tourisme dans notre développement, encore moins dans notre société. Or, un tourisme d’une dizaine de millions de visiteurs, comme on l’appelle de nos voeux, est une affaire collective. Il implique un traitement par notre société de cette insertion vacancière mais continue d’un corps aussi étranger ». Sommes-nous prêts à faire face à cette situation, qui va bousculer au quotidien nos habitudes, nos comportements, nos valeurs, notre manière d’être et de vivre, notre rapport à l’autre, celui-ci nous renvoyant également des regards croisés ?

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