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Bush : Ce n’est pas du cinéma

“C’est un manque à gagner terrible pour la région et pour ses habitants. Dommage que ces derniers soient privés de cet atout formidable qui leur permet de subvenir à leurs besoins ». Ce cri de coeur émane de Essaïd Ameskane, ex-député de la région de Ouarzazate. Un cri de désolation à propos des productions américaines qui devaient être tournées dans les studios de cinéma de cette partie sud du pays mais qui, à la dernière minute, ont été annulées à cause de la menace d’une deuxième guerre du golfe. Il a suffi que le Royaume soit classé dans la liste des “pays à risque“ pour que Hollywood se détourne du Royaume, préférant tourner les films programmés à Ouarzazate dans d’autres contrées jugées “sécurisées“.
Les gens de Ouarzazate, en particulier, ont vécu cette situation comme une injustice. D’abord et surtout parce qu’ils ne voient pas du tout en quoi les cinéastes américains et leurs équipes sont-ils menacés. Bien au contraire. Ouarzazate est un havre de paix et une oasis verdoyante dans un décor fabuleux. Les habitants de la région, quant à eux, sont réputés pour leur bonhomie légendaire et leur tolérance, leur sens de l’hospitalité et de l’accueil. Ni agressifs, ni impulsifs, simples et spontanés.
Alors de quoi s’agit-il ? Il semble que les groupes d’assurances américains, sur la base du classement du Maroc comme destination à risque, aient refusé de prendre en charge les frais d’assurance des productions destinées initialement à Ouarzazate. Un jugement de valeur qui, ne correspondant pas du tout à la réalité, stigmatise gratuitement et injustement toute une région, tout un pays et tout un peuple.
Le Maroc est encore victime des amalgames et de son appartenance au monde arabo-musulman. Le Maroc mis dans le même sac là où il fallait faire preuve de discernement !
Pas de films donc cette année pour Ouarzazate et sa région. La population locale, impuissante face à cette situation, livrée à elle-même, ne comprend guère, ce qui lui arrive. Avec le tourisme, l’industrie du cinéma représente pour elle les deux principales sources de profit et de subsistance. Quand Hollywood boude Ouarzazate c’est plusieurs milliards injectés dans l’économie locale qui partent en fumée. Quand Hollywood ne fait pas confiance à Ouarzazate, ce sont plusieurs métiers qui sont sinistrés : artisans, tailleurs, menuisiers, forgerons…. sans oublier les transporteurs, les restaurateurs, les hôteliers et les agents de voyage. C’est toute une chaîne d’activités qui se trouve subitement brisée, mise à terre. Les figurants, choisis par milliers parmi les gens de la région sont eux, tout simplement mis au chômage, privés de la seule opportunité qui leur permet de s’assurer un revenu décent : 200 Dhs par jour pendant une semaine ou plus de tournage, ce n’est pas rien, c’est même une fortune dans une contrée où sévit la sécheresse. Maintenant, à défaut de participer à des tournages, ils sont condamnés à tourner en rond. Vers qui se tourner pour trouver une activité de substitution ? Malheureusement, Il n’y en a pas. Les touristes qui adorent les produits du désert se font de plus en plus rares, eux aussi, par ces temps qui ne courent plus, figés dans la dynamique maléfique de la Guerre de Bush. Alors, bonjour l’ennui et les ennuis. Bonjour la dèche et l’oisiveté.
C’est la mélopée du malheur de toute une région qui paie déjà au prix fort les pots cassés d’un conflit auquel elle est étrangère. Conséquences ravageuses d’une simple mention “ destination à risque“ collée à la légère sur le fronton d’un pays, ami des Etats-Unis, connu pourtant pour sa stabilité et sa tolérance. Chronique de lendemains qui déchantent.
Les Américains méconnaissent-ils à ce point les réalités du Maroc? Que faire sinon se résigner et prendre son mal en patience ! Cependant, une question se pose d’elle-même : les intervenants marocains, privés et institutionnels, impliqués dans les tournages américains au Maroc ont-ils suffisamment communiqué en direction des centres de pouvoir cinématographiques US pour leur expliquer le Maroc et ses spécificités, Ouarzazate et ses particularités ? Non, bien sûr. Les intéressés, sonnés ou indifférents, n’ont même pas réagi au sort infligé à Ouarzazate. Quand on sait qu’un black-out a toujours été maintenu sur le montant exact de la manne générée par les films produits au Maroc, sur les circuits par lesquels transite l’argent ainsi que sur les boîtes marocaines qui en profitent … ! En fait, tout cela est triste comme un navet.

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