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Cherfaoui : «ancrer la ville dans le port»

© D.R

ALM : Le port de Casablanca est censé être certifié, conformément aux normes ISPS. Qu’en est-il réellement ?
Najib Cherfaoui :
Effectivement, la certification était attendue pour le premier juin 2004, elle est devenue effective en septembre de la même année. La commission pour la sûreté du port de Casablanca en plus d’un comité national présidé par le ministre de l’équipement ont évalué les modalités d’Equipement, d’organisation ainsi que le zoning retenu pour les différents ports. Le port de Casablanca a été divisé en sept zones, cloisonné avec murs de clôtures.  En septembre 2004, donc, le port de Casablanca a été déclaré conforme aux normes ISPS. Bien avant, il a été audité par le bureau d’études Guy Ressac. Théoriquement, par principe, le port n’a rien à se reprocher. Sur le terrain, un scanner fixe et un autre mobile ont été commandés. Le fixe est installé depuis janvier 2005. Le personnel est encore en formation. L’ensemble représente un investissement de 90 millions de DH.

Le problème des clandestins est devenu un véritable fléau menaçant l’activité du port. Quel en est votre regard ?
Pour moi, le clandestin n’est assurément pas un problème portuaire. On ne peut justement pas reprocher au miel d’attirer les abeilles. C’est un espace de convoitise pour ses marchandises et pour la porte qu’il représente sur l’extérieur, ce qui au demeurant naturel. Le port a bien fait la ville, on ne peut pas lui reprocher d’être un pôle d’attraction. Sa vocation était commerciale et industrielle. Aujourd’hui, il devient l’objet d’une pression. À mon sens, il faut plutôt changer la relation de la ville au port.  Je reste convaincu que la porte la mieux fermée est celle qui reste ouverte. Si nous relions le port à la trame urbaine, alors l’architecture et les citoyens emprunteront leurs références aux valeurs balnéaires, portuaires et maritimes. Cet espace ne sera pas une issue de secours, mais de recueillement. La ville doit être ancrée dans le port.

En attendant, les opérateurs subissent de plein fouet les conséquences de ce phénomène. Ne faut-il pas mieux opter pour la fermeté ?
Franchement, la bunkerisation du port de Casablanca a atteint ses limites. Tout le port est structuré en fonction des clandestins. Ces derniers ont une imagination à l’infini. Ils ont même inventé des systèmes sous- marins.  Côté armateurs, le préjudice est énorme. Il faut savoir que l’armateur risque une amende de 300 000 euros par clandestin transporté.
Paradoxalement, la communauté de clandestins s’est structurée. Elle a ses codes. Il ne faut surtout pas croire qu’il s’agit de cas isolés, avec des singularités. C’est désormais un phénomène permanent. Une rivière qui coule vers le port de manière régulière. Le pic est atteint les jeudis et samedis, lors des Ro Ro (NDLR : Roll on, Roll off, un terme désignant les camions qui chargent leurs marchandise), voire même, prenant le départ depuis les usines. Le chiffre annuel est en moyenne situé entre 7000 et 10 000 clandestins capturés.  Le problème reste posé. On ne pet pas mobiliser un gardien pour chaque clandestin, ou encore un gardien du gardien !

Que risque un clandestin arrêté ?
Concrètement, rien. Un vide juridique est réel. La loi reste muette à ce sujet. Par principe, le parquet ne retient aucune charge vu qu’il n’y a ni vol ni effraction. Le clandestin est aussitôt relâché, d’ailleurs, la récidive est fréquente du moment qu’ils sont conscients de ce vide.
La direction de l’immigration, relevant du ministère de l’Intérieur et l’Observatoire doivent proposer une réponse. 

Ailleurs, a-t-on résolu cette équation ?
Il faut croire que l’Europe, grâce à sa politique d’ouverture, a contourné le problème. Les Tunisiens et les Algériens ont le même problème. Toutefois, le détroit de Gibraltar reste dans l’imaginaire collectif le meilleur passage. Il reste de ce fait le passage obligé. Par contre, des dérapages sont indéniables. La situation précaire des clandestins ouvre la porte à tous les trafics. Les trafics multiples qui s’y greffent sont multiples et dangereux, là réside assurément le vrai préjudice.

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