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Comment fonctionne le Mouvement de tous les démocrates de Fouad Ali El Himma

© D.R

Le Mouvement de tous les démocrates (MTD) ne sera jamais un parti politique. Son initiateur, Fouad Ali El Himma, ne cesse de le répéter à chaque fois qu’il en a l’occasion. Une chose qui n’est pas pour plaire à plusieurs de ses membres fondateurs et à la majorité des personnes qui ont choisi de naviguer dans son orbite. Mais, le fondateur du mouvement reste intransigeant sur la question. Pourtant, le MTD aurait fait un bon parti politique. Il en a tous les atouts. Il s’agit d’un mouvement – donc d’un courant de pensée – qui s’articule autour de la démocratie et de toutes les valeurs qu’elle défend. Et, dans un pays en transition démocratique, créer une coalition politique ayant pour objectif de réunir les défenseurs du choix démocratique pour faire face aux adversaires de celle-ci est tout à fait normal. Il faut juste qu’il y ait, en face, des adversaires avoués de la démocratie. Ensuite, il y a le fait qu’il réunit plusieurs acteurs politiques dont l’honnêteté et la bonne volonté politique ne font aucun doute.
Mais, M. El Himma refuse de céder à la tentation et aux pressions exercées sur lui – directement ou indirectement – pour franchir le pas et donner à son mouvement une étiquette politique. Ceux, parmi son entourage, qui soutiennent cette façon de voir les choses, estiment qu’il est préférable d’agir dans le politique à travers trois fronts au lieu de se restreindre au seul aspect politique. Les trois fronts sont la proximité sociale, la dynamique communale et la concentration partisane. Trois axes de mobilisation qui mènent tous à un seul but : redessiner la carte partisane et parlementaire en 2012. C’est au moins ce que les dirigeants du MTD espèrent réaliser.
Comment ? Le principe se base sur la vision des affaires publiques qui s’est forgée ces dernières années à savoir que le citoyen marocain est plus sensible à ses besoins socioéconomiques directs qu’à des discours macropolitiques. Le début de la reconstruction du champ politique national sur des bases démocratiques saines revient donc, pour l’initiateur du mouvement, à redonner confiance au citoyen dans l’action politique en lui prouvant que son vote peut avoir un impact réel sur sa situation. L’exemple de Rhamna est très éloquent : en votant, lors des élections du 7 septembre 2007, pour la liste «Dignité et citoyenneté» dirigée par Fouad Ali El Himma et dont le symbole électoral était «le tracteur », ils ont vu comment, à peine quelques mois après, leur situation socioéconomique a commencé à s’améliorer notamment à travers le programme de développement qui a été lancé récemment par le Souverain avec un budget de 7 milliards de dirhams. Un plan de développement où la Fondation Rhamna, créée et présidée par le député de la région, Fouad Ali El Himma, avec ses co-candidats aux législatives, Fatiha El Ayadi et Hamid Narjiss, a joué un rôle déterminant dans son élaboration. La méthode El Himma est donc claire : une fondation à vocation socioéconomique travaille sur le terrain pour évaluer les besoins et réfléchir à la meilleure manière d’aider au développement local, elle sert de force de proposition aux autorités centrales à travers des élus parlementaires «dynamiques et dévoués», l’exécution du programme se fait grâce à des élus locaux «honnêtes et volontaristes» et la boucle est bouclée.
Il suffit juste de trouver les bonnes personnes, les bonnes associations qui présenteront de bons projets… Tout cela, évidemment, dans toutes les circonscriptions électorales du Royaume. Ce qui semble, pour certains, comme étant très difficile. La tournée qu’effectue le MTD dans les différentes régions du pays est une sorte de repérage avant de commencer le tournage. Une tournée qui sert à faire un casting pour trouver les acteurs qui joueront les rôles principaux mais aussi les figurants qui se changeront de l’animation en arrière-plan.
Ainsi, la menace qui pèse sur l’élan pris par le mouvement émane surtout de la bagarre qui tourne autour de ces rôles principaux tant au niveau national que régional. Dans les régions visitées par le MTD, on remarque toujours la présence aux premiers rangs de ceux-là même qui ont contribué à l’échec de la politique de développement local et au pourrissement de la gestion communale de leurs régions respectives. En quête d’une nouvelle virginité, ils se positionnent en tête de ceux qui offrent leurs services au MTD. La sélection a beau être minutieuse, elle finira certainement par laisser passer des personnages pareils.
Mais là où la bagarre fait rage c’est au niveau central. Au Parlement, la coalition créée autour du parti Al Ahd, dirigé par Najib Ouazzani, pour fonder le groupe «Authenticité et modernité» est déjà passée, à peine huit mois après sa création, à une situation de crise où ses composantes commencent à sentir le besoin d’être rassurées sur leur avenir politique dans le cadre du projet Fouad Ali El Hima dans sa globalité. Ne voulant pas être relégués à un simple rôle de «bras parlementaire» par les décideurs du MTD, les quatre partis qui forment le groupe  : Le Parti national démocrate (PND),  le Parti Al Ahd, le Parti du renouveau et de l’équité (PRE) et l’Union marocaine pour la démocratie (UMPD), ont multiplié les appels à procéder à une intégration au sein d’une formation politique avant de passer à l’action en créant l’Alliance démocratique et sociale, le 29 mai.
Une sorte de réaction spontanée – mais jouissant de la bénédiction du patron du MTD – au rapprochement effectué par une frange du mouvement en direction du MP et du RNI afin de prospecter les possibilités de créer un «Grand Pôle libéral». En l’espace de quelques mois, le mouvement se trouve divisé entre trois tendances : créer un parti, opter pour la coalition émanant du Parlement ou fédérer des partis de l’extérieur de cette alliance notamment les deux grandes formations du RNI et du MP. Le choix semble difficile étant donné que toute option peut provoquer des dégâts collatéraux dont on ne maîtrise pas l’ampleur.
Sur le volet social et l’action de proximité à même de baliser le terrain devant le MTD lors des élections communales de 2009, il existe aussi des différends qui commencent à voir le jour et qui menacent la cohésion entre les différentes composantes du mouvement El Himma. Ainsi, l’association Arid emboîte le pas, efficacement, à la Fondation Rhmana en travaillant pour le développement local de la région du Rif comme en témoigne la réunion de tout un comité interministériel à Al-Hoceima en mars 2008 sur initiative d’Ilyas Omari, un des proches conseillers de Fouad Ali El Himma. Mais, son action éclipse le travail d’un député de la région du Rif qui est aussi un membre important dans la coalition d’El Himma à savoir Najib Ouazzani, le leader du parti Al Ahd. Les deux personnages se livrent à une guerre froide autour du leadership de la sensibilité rifaine au sein du MTD. Pour le moment, Ilyas Omari est donné vainqueur par la plupart des observateurs. Mais la bataille n’est pas encore finie et le MTD a intérêt à ce qu’elle s’arrête. Une chose difficile, mais vitale. Ce qui est valable pour toutes les batailles internes qui constitueront le plus grand obstacle devant le MTD. La gestion du volet médiatique du mouvement en fait partie. Deux grosses pointures du mouvement se disputent la définition de la politique générale de ce dossier : Ahmed Akhchichine et Hassan Benaddi. L’exécution, elle, ne pose pas de problème, elle est menée par El Bachir Znagui. Autre sujet de conflit : l’exploitation du volet des droits de l’Homme. Salah Ouadii, compagnon de route de feu Driss Benzekri est officiellement en charge du dossier des droits de l’Homme au sein du mouvement. On lui a confié l’une des missions les plus sensibles : faire des recommandations contenues dans le rapport de l’Instance équité et réconciliation (IER) un point élémentaire dans le programme du mouvement. Des militants des droits de l’Homme agissent de l’intérieur comme de l’extérieur du mouvement pour bloquer le processus. Les blocages qui ont suivi la création de la Fondation Driss Benzekri des droits de l’Homme le 10 mai, en témoignent.           
Mais, il n’est pas le seul. L’autre grand problème du mouvement est celui de la multiplication des fronts politiques notamment vis-à-vis des partis dont l’utilité politique est indiscutable de l’avis général des observateurs mais qui se sentent directement visés par la vague du MTD : l’USFP, parti ayant une légitimité historique, une forte présence dans le paysage démocratique et une grande capacité de stabilisation institutionnelle et le PJD, parti islamiste ayant confirmé le fait qu’il bénéficie d’une audience politique relativement importante et qui représente, indéniablement, une sensibilité au sein de la société marocaine.
Ces deux formations se sentent dans le collimateur du MTD et exigent, de ce fait, à défaut d’un pacte de non agression, une clarification élémentaire à savoir s’il s’agit d’une orientation générale du pouvoir ou s’il s’agit, tout simplement, d’une bataille de positionnement ordinaire entre adversaires politiques.
Une clarification, — le rejet d’une certaine confusion tactique entretenue — qui est de plus en plus exigée par l’ensemble de la classe politique, et qui est de nature à rassurer non seulement ces deux formations mais tout le champ politique national.

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