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Cordonnier mal-chaussé…

«Nous sacrifions notre vie sans contrepartie ni même une reconnaissance de la part des citoyens ou de notre administration ». On ne s’attendait pas à cette réponse qui émane d’un responsable de la sûreté nationale quand on l’a interrogé sur les conditions de travail de la police. Il n’a pas osé dire plus. «la situation est connue par tous et les mass média ont déjà soulevé le problème des conditions de travail au sein de la police », ajoute-t-il pour clore sa déclaration style télégraphe, avec un «point stop» comme s’il lisait un message de service. « Les policiers sacrifient leur vie au bien être des citoyens, à leur sécurité», confirme un autre. «Notre souci est clair et notre situation et nos conditions de travail sont connues par tout le monde…», précise-t-il. «Les policiers travaillent en général dans des conditions archaïques…Certes, ajoute-il, les citoyens se plaignent à chaque fois que la police ne répond pas à leurs appels quand ils appellent le n°19… Mais ils ignorent le pourquoi d’un tel manque. Ils ne savent pas que les policiers disposent parfois d’une seule voiture pour se déplacer, pour effectuer un constat, pour répondre à une demande de secours…Pire encore, ils peuvent parfois manquer de papiers pour dresser les procès-verbaux.
Nous nous adressons parfois aux communes urbaines pour avoir du papier… », affirme un responsable de la police judiciaire. Aucun des policiers interviewés n’a laissé entrevoir une lueur d’espoir. Les conditions de travail font cruellement défaut et la rigueur mise en place complique la situation. Les policiers sont tenus par des obligations de résultats, sans pour autant que les moyens suivent. La volonté et l’amour de la mission semblent, globalement, présents. «Nous aimons ce métier et nous l’aimerons encore…Mais les conditions déplorables de travail ne nous encouragent pas ». Elles découragent et étouffent la moindre initiative.
Cependant, les agents ne sont pas à l’abri des accusations fallacieuses. «La moindre accusation d’un prévenu peut te jeter dans les ténèbres des prisons», affirme un autre responsable de la sûreté en se référant à l’affaire des trois éléments de la police de Casablanca-Anfa qui ont été arrêtés après avoir été accusé de connivence avec un trafiquant de drogue de Casablanca. Ils ont passé des jours avec des délinquants au pénitencier Oukacha pour être acquittés par la Justice. «C’est la récompense idéale !», s’exclame-t-il. La question est : pourquoi cette humiliation ? S’interroge un flic qui a remarqué : que «nous subissons un châtiment collectif dès que l’un de nous est accusé de malversation. L’accusation est trop facile puisque notre travail est le moins récompensé dans notre société… ». Pas de prime, pas de motivation, pas d’encouragement, pas d’assurance maladie, sauf une bonification causant une augmentation dérisoire de salaire si un limier réussit dans une affaire qui défraie la chronique judiciaire et une assurance-vie de 50 mille dirhams versé à la famille en cas de décès, explique-t-il.
Une réalité choquante. « Nous ne sommes pas indemnisés pour les heures supplémentaires…», ajoute-t-il. « Nous ne pouvons pas revendiquer ou protester en observant des grèves et des sit-in à l’instar des pays européens…», affirme ce policier qui a passé une vingtaine d’année au service de la sûreté. « Les 2500 à 5000 dh comme salaire mensuel que touche un policier peuvent-ils répondre aux exigences de la vie d’un homme qui veille sur la sûreté des citoyens ?» s’interroge un autre officier de police.
C’est dire la misère dans laquelle ce corps qui veille sur notre sécurité vit au quotidien. Prend-on le temps d’y songer ? Ne serait-ce qu’un petit instant!

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