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Deux séropositives témoignent

© D.R

Le sida, maladie incurable, est une source de souffrance terrible pour toute la vie. Elle sévit toujours dans les quatre coins du monde. Le nombre de ses victimes se multiplie chaque année. Ses ravages sont désastreux. Elle conduit à la solitude, la dépression ou à la folie. Et même parfois au suicide. Des familles brisées, des enfants innocents contraints à confronter une réalité déchirante. Leïla et Nadia, deux femmes porteuses du virus VIH, d’âges et de milieux sociaux différents, témoignent de leur vie au quotidien avec la maladie. Elles nous livrent avec émotion leurs secrets, leurs peines, leur colère, leur désespoir, mais également leur raison d’être, leurs enfants. Âgée de 43 ans, Leïla, femme divorcée et mère de deux enfants, également séropositifs, âgés de moins de 14 ans, n’arrive toujours pas à accepter sa maladie et se demande ce qu’elle a pu faire dans la vie pour être ainsi "punie par le destin". Elle vit avec sa séropositivité depuis plus de dix ans. "La maladie du Sida a gâché ma vie de femme. Mon mari et moi n’avons pas pu continuer ensemble. Nous avons divorcé. À cause de ma maladie, j’ai perdu mon emploi. Le Sida a également détruit la vie de mes enfants. Je n’ai plus d’espoir en l’avenir. La mort taraude mon esprit chaque minute. La douleur ronge mon cœur de mère. Je pensais toujours que "ça n’arrive qu’aux autres et pas à moi". Ce qui me fait plus souffrir est le fait que la maladie m’a été transmise par mon mari. Et je l’ai transmise à mon tour à mes propres enfants. Ils sont victimes d’un mal, d’erreurs qu’ils n’ont pas commises.", confie-t-elle, les larmes aux yeux. De chaudes larmes qui coulaient, malgré elle, sans s’arrêter. "Mon fils, alors âgé d’un an et demi, tombait souvent malade. Il était très faible. Son état de santé se dégradait de jour en jour. Le médecin nous a alors conseillé de faire le test de dépistage du VIH", ajoute-t-elle, la voix serrée et tremblante. L’annonce du diagnostic est calamiteuse pour cette jeune femme. Le choc est indescriptible. Tout semblait s’écrouler autour d’elle. Elle était en colère et révoltée. Toutefois, elle savait qu’elle ne pouvait pas changer le cours des choses. Elle savait également que leur vie est désormais conjuguée au présent. Issue d’une famille conservatrice, Leïla a préféré garder le secret de sa maladie vis-à-vis de son entourage et de ses proches. Elle avait peur du rejet et de la discrimination. Le risque était grand, pour elle, d’être jugée et condamnée par la société. "Je ne me suis jamais confiée à ma grande famille ni à mes amies. J’ai peur de leurs regards méprisants et de leur rejet. J’ai plus peur pour mes enfants. J’ai décidé de préserver le secret face à l’école afin qu’ils ne vivent pas de discrimination et ne souffrent pas d’une différence où ils ne sont pour rien. À cause de leur maladie, ils s’absentent souvent de leur école. À chaque fois, j’invente des prétextes pour justifier ces absences répétées. Je prends toutes les précautions pour que notre maladie soit tenue secrète. Je cache même les médicaments.", confie-t-elle. Le sentiment, estime-t-elle, de ne pouvoir aider ses enfants est très déchirant.
Souffrant de la même situation tragique, Nadia, veuve âgée de 34 ans et mère également de deux enfants qui ont eu la chance d’échapper à l’infection, a par contre contracté la maladie lors d’un rapport sexuel non protégé avec son amant. Après le décès de son mari, elle a entretenu une relation amoureuse avec un autre homme. "Avant, je savais que le Sida existe au Maroc. J’avais demandé à mon amant d’utiliser le préservatif, mais il a refusé. Il a dit que ce sont des balivernes. Je n’ai pas pris mes précautions et voilà le résultat.", se rappelle-t-elle, amère. Quand elle a appris sa séropositivité, il y a trois ans de cela, elle n’est plus la même personne. Sa vie a basculé en une fraction de seconde. La femme d’autrefois, dynamique, vivante, passionnée, rieuse, n’est plus que l’ombre d’elle-même. Elle s’est renfermée sur elle-même. "Depuis ce jour sombre, je me déteste. Ma vie s’est arrêtée. Je suis devenue très solitaire. Je me suis éloignée de mes amies. L’idée du suicide a souvent effleuré mon esprit. L’avenir de mes enfants est compromis à cause de moi, de mes agissements. La culpabilité me tue. Actuellement, ils ne sont pas au courant de ma maladie. Mais, j’ai peur.", ajoute-t-elle, le cœur plein d’amertume.
A l’association OPALS (Organisation pan-africaine de lutte contre le Sida), Leïla et Nadia trouvent refuge, conseils et soutien psychologique. En compagnie de dizaines d’autres malades, elles essaient de remonter la pente. Difficilement.

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