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Dr Abdelmalek El Hannaoui : «Cette décision prépare la libéralisation du capital médical»

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ALM : Assistons-nous vraiment à des démissions de médecins du public en réaction à la décision du ministère de leur interdire l’exercice dans le privé ?
Dr El Hannaoui Abdelmalek : Les démissions des médecins du public se multiplient en réaction à la récente décision du ministère leur interdisant d’exercer dans le privé. Ainsi, notre syndicat a noté pour la seule région de Tanger 24 dépôts de démission de médecins spécialistes, soit 50% de l’effectif de toute la région, il y en a aussi à Marrakech. On note également une vingtaine d’autres démissions de professeurs du CHU de Casablanca, démissions qui ont été acceptées et qui sont en cours de traitement au sein du ministère de la santé. La plupart de ces médecins ont démissionné après l’expiration de leur contrat de 8 ans les liant à l’Etat, et en réaction à une décision que nous jugeons populiste.

Cette décision a pour principal but de règlementer le secteur, l’intérêt des citoyens n’impose-t-il pas aux médecins de s’y conformer ?
La décision du ministère de la santé est purement politicienne, elle n’est pas prioritaire pour la réforme du secteur de la santé. Elle a été prise de manière unilatérale et sans concertation avec les principaux concernés, à savoir les médecins et sans les impliquer. Aussi elle a été accompagnée d’une large campagne de dénigrement du métier de médecin. Alors qu’il n’y a aucune reconnaissance de leur travail, ou prise en compte de leurs revendications. Exerçant dans des conditions défavorables, les médecins sont régulièrement harcelés, agressés, poursuivis en justice…, alors que ce ne sont pas eux les véritables responsables de la défaillance du système de santé. La priorité du ministère aurait été d’améliorer les conditions d’exercice des médecins et d’accueil des malades. Conditions qui ne cessent de se dégrader, alors que les stratégies des ministres de la santé se succèdent, se sabotent les unes les autres et n’obéissent à aucune continuité. Par ailleurs, notre syndicat a donné un ultimatum au ministère jusqu’à la 3ème semaine de janvier, le sommant d’activer la mise aux normes internationales de nos hôpitaux publics, sinon nous promettons une escalade des protestation.

Quel est l’impact de cette décision ?
D’abord, les cliniques privées seront sans ressources médicales, et d’ailleurs cette crise commence à se faire sentir chez elles. Ainsi contrairement au médecin qui n’a pas le droit de choisir ses patients, ces derniers se trouveront privés du droit de choisir l’établissement où ils veulent être soignés, ils auront pour seul choix un hôpital public non-conforme aux normes. Ainsi aujourd’hui, le ministère de la santé applique la loi de manière élitiste et irrévocable, sans mesures accompagnatrices, juste pour tordre les bras aux médecins. Dans ce sens, cette décision est un moyen de les préparer à d’autres mesures et lois visant la libéralisation du capital médical, c’est-à-dire que des investisseurs non médecins pourront employer les médecins étrangers et le corps médical comme de simple salariés. On assiste déjà à la construction de cliniques par des étrangers et des holdings, à Casablanca, à Marrakech, à Saâdia… et s’inscrivant dans le concept de tourisme médical, alors qu’aucune loi ne le permet.

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