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Éditorial : Chambre à air

© D.R

Ce qui se passe sous la coupole n’est pas franchement inhabituel. C’est même devenu une pratique qui s’est imposée comme allant de soi. L’achat des voix s’est transformé au fil du temps en acte le mieux partagé par une classe politique qui a du mal à exister et à être concrète en dehors des arguments financiers. Le souk est déjà ouvert, les enchères montent crescendo, les prix des voix de chaque membre d’un collègue électoral  valent plusieurs dizaines de millions. À défaut de voix politiques qui portent, vive la démocratisation des voies qui rapportent !   
En fait, la démocratie à la marocaine est d’un pragmatisme qui défie toutes les lois.  N’a-t-on pas vu des députés démissionner, sans que cela tire à conséquence, d’une première Chambre dont la législature tire à sa fin dans l’espoir de négocier une place à la deuxième où le mandat est de neuf ans ? En tout cas, la formule“ le temps c’est de l’argent“ prend ici toute sa signification. Et puis, la deuxième Chambre a ceci d’avantageux qu’elle permet de contourner le suffrage universel direct où il faut affronter non sans incertitude des milliers de “petits“ électeurs alors que les élections indirectes favorisent la négociation avec quelques grands électeurs tout en étant sûr de gagner.   Après le nomadisme politique et la valse des étiquettes, voici venu le temps de l’acrobatie parlementaire.
Ce numéro, amusant à défaut d’être périlleux, ne semble pas émouvoir grand monde. On n’a pas entendu par exemple le président de la première Chambre Abdelouahed Radi crier au scandale face à ce qui ressemble à une véritable migration mi-clandestine, mi-tolérée. Avec la transhumance qui bat son plein et l’absentéisme qui fait des ravages,  ce n’est plus un Parlement, c’est une chambre à air rapiécée. Ça fuit et ça fuite de partout. Bien sûr, certains esprits légalistes  peuvent arguer que le fait de changer de Chambre n’est pas interdit par la loi. Mais pourquoi les groupes parlementaires n’ont pas insisté pour que cela soit interdit au moins par le règlement intérieur du Parlement en attendant le grand texte juridique sur la question ?   
En tout cas, tout cela nous donne un avant-goût du climat des prochaines législatives de 2007. Achat massif des voix et des têtes de listes sur fond de lutte pour les bonnes places. Autrement dit, les mêmes pratiques qui ont faussé depuis toujours le jeu politique et démocratique dans le Royaume ont encore un bel avenir. Des pratiques dénoncées en public par les partis politiques mais qui les arrangent dans le fond. Pour eux, un député n’est ni bien ni mal élu. D’ailleurs, on n’a jamais vu une structure partisane refuser en son sein un parlementaire douteux. C’est un homme qui est égal à un siège.  Un siège précieux dans la négociation en vue de l’entrée au gouvernement. Ce qui n’est pas le cas des conseillers qui, lorsqu’ils sont nombreux, permettent juste à un parti de dire qu’il est la première force politique du pays. Une force sur le plan de l’arithmétique bien sûr. Quant à la politique, tout comme les promesses, elle n’engage que ceux qui y croient.   

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