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Éditorial : Hémorragie

© D.R

Aux grands maux, les grands remèdes. Le projet de loi, qui vient d’être adopté par la Chambre des conseillers, est à la mesure de ce qui relèverait du vol pur et simple de l’effort des autres. Le piratage, puisque c’est de lui qu’il s’agit, aura désormais la vie dure. Très dure. A preuve, et pas des moindres, ceux qui se permettront de bafouer les droits d’auteur ne seront plus poursuivis selon le Code pénal. Il s’agit ici d’un ennemi spécial, parce que son «acte» touche à un bien tout à fait exceptionnel : la matière grise. Celui qui osera encore contrefaire, plagier ou pirater les idées de l’autre écopera de sanctions «Spécial pirates». Selon le texte du projet de loi 34.05, la peine irait de 2 mois à 4 ans d’emprisonnement avec une amende allant de 10.000 dhs à 600.000 dhs ( !). Le verdict est sans appel, à moins qu’il y ait des circonstances atténuantes. Ce qui, au jour d’aujourd’hui, ne semble pas envisageable, sachant que le phénomène du piratage au Maroc a atteint des proportions très alarmantes. Un simple détour du côté de Derb Ghellef, et voilà le gâchis ! Un album, dont les droits d’auteur ont été enregistrés, est bradé à 5 dirhams l’exemplaire. Ce qui dénote du pur mépris pour l’effort de ceux qui ont le mérite réel de l’avoir monté : parolier, compositeur, arrangeur, interprète, sans oublier évidemment les instrumentistes, l’ingénieur de son, et tout, et tout. Un vrai parcours de combattant pour ceux qui ont fait le choix honnête et néanmoins très difficile de vivre de leur art, ou du métier d’écrire. Que le fruit d’un effort patient soit copié, ou contrefait, pour finir dans les étals de Derb Ghellef, et être vendu au même prix qu’une tablette de chocolat, cela est non seulement un signe d’inconscience, ou d’irresponsabilité, mais la preuve bouleversante de l’injure que plusieurs, pour ne pas dire certains, continuent de faire à un métier noble comme l’art. La complicité de plusieurs citoyens avec ces pirates-là, qui se voient attribuer en prime le statut de «génie de Derb Ghellef», est condamnable à plus d’un titre. En continuant à s’approvisionner chez ces gens-là, non seulement ils encouragent le «marché du faux» à s’épanouir, mais ils hypothèquent l’avenir même de la pratique artistique et littéraire dans notre pays. Pour se rendre à cette amère évidence, il suffit de se demander pourquoi les maisons de production ferment boutique, que les artistes n’enregistrent plus, quand ils ne prennent carrément pas leurs pieds à leurs cous pour aller s’exiler sous d’autres cieux. Raja Belémlih, Abdou Cherif, Leila Ghofrane, pour ne citer que ces talents, n’auront jamais envisagé d’émigrer au Caire ou à Dubaï, si le piratage au Maroc n’avait pas atteint une dimension aussi inquiétante.
Espérons que l’adoption de ce nouveau projet de loi permettra de stopper l’hémorragie.  

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