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Éditorial : Informel à ciel ouvert

La Joutia de Derb Ghallef à Casablanca vient de se doter d’un site sur Internet. L’information a quelque chose d’inédit compte tenu de la nature de ce marché aux puces pas comme les autres. Un espace de commerce gigantesque et florissant où l’on trouve de tout (de l’électroménager au hi-fi en passant par l’habillement et l’alimentaire…). Sans oublier le piratage phénoménal musical, informatique et cinématographique. Ici, les clients ne se recrutent pas seulement dans la catégorie des petits revenus. S’y rendent aussi les riches et les moins riches à la recherche de bonnes affaires avec un bon rapport qualité-prix.
C’est là le principal avantage de la Joutia qui offre toute une gamme de produits à des tarifs défiant toute concurrence à la grande satisfaction du client. Des prix largement inférieurs à ceux pratiqués habituellement dans le commerce légal. Car la Joutia c’est l’informel à tous les étages. La fièvre acheteuse bat son plein notamment pendant les jours de week end. Celle-ci est telle qu’il est difficile de trouver où garer son véhicule.
Une aubaine pour une foule de jeunes désoeuvrés qui s’improvisent gardiens de voitures dans une zone où la pagaille le dispute à la saleté. Un environnement désordonné où chacun trouve son compte y compris les autorités de la ville de Casablanca qui semblent s’en accommoder.
En dehors d’une redevance modique payée à la commune du Maârif, les commerçants, qui brassent des chiffres d’affaires importants difficilement quantifiables, ne s’acquittent d’aucune taxe. Ni patente, ni TVA, ni impôt. Tout bénéf. C’est dire le manque à gagner que cette économie souterraine à ciel ouvert représente pour les pouvoirs publics.
Sans exagération aucune, la Joutia, qui compte plusieurs centaines de boutiques bien achalandées, constitue de loin le premier pôle commerçant de Casablanca où les articles exposés sont pour la majorité d’origine étrangère. Avec les téléphones portables dernier cri, le prêt-à-porter italien (costumes, chaussures, chemises, jaquettes…) arrive en tête des préférences des clients. Alors comment ces quantités importantes de marchandises diverses arrivent-elles à être introduites en permanence sur le territoire national? Longtemps, on a cru ou voulu faire croire que la contrebande était le fait d’individus sans emploi qui se rendent dans le nord du Maroc où ils achetaient divers produits espagnols qu’ils revendent ensuite aux commerçants de Casablanca. Ceci est un cliché destiné à masquer la réalité . La Joutia de Derb Ghallef c’est de la grosse contrebande avec des réseaux organisés et des circuits bien établis. Certes, tout le monde est d’accord sur le fait que la contrebande est un mal qui tue l’économie nationale. Mais le combattre ou du moins en réduire l’intensité nécessite de la part de l’État une action énergique à la source, c’est-à-dire au niveau de ses protecteurs. La Joutia de Deb Ghallef n’étant qu’une manifestation flagrante de ce phénomène de grande ampleur qui rapporte beaucoup aux contrebandiers. Il n y a pas plus mortel que le laxisme.

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