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Éditorial : Mentalité d’assistanat

© D.R

On ne voit qu’eux. En milieu urbain, ils sont devenus le paysage qui s’impose à chacun. Ils sont partout. Dans la rue, sur les boulevards, à l’intérieur des marchés, aux feux rouges, sur la terrasse des cafés, devant les magasins… Pas un coin ou un lieu public ne leur échappe. “Eux“ ce sont les mendiants. Ils sont de tous les âges. Hommes, femmes, petites filles, garçonnets, vieillards, jeunes et moins jeunes… Faire la manche au Maroc est devenu un sport national, dont la vigueur, voire l’agressivité, a atteint des proportions incroyables. Dans ce domaine, on rivalise sans cesse d’imagination et de créativité pour susciter la pitié des gens et provoquer leur générosité. Pendant Ramadan, ce phénomène social connaît certes une acuité toute particulière étant donné que le mois sacré est connu pour être propice aux élans de bonté et de charité. Mais force est de constater que la recrudescence de la mendicité, érigée par ailleurs en métier qui a ses techniques et ses réseaux, est intimement liée à l’évolution du contexte national. Dans un pays où les vannes de la solidarité ont été ouvertes, celle-ci représente à coup sûr un appel d’air pour tous ceux qui se croient éligibles à l’entraide. Autrement dit, les “candidats à la manche“, réellement dans le besoin ou non, profitent de cette dynamique pour solliciter l’assistance de leurs congénères. Mais à voir le nombre impressionnant de mendiants qui s’activent rien qu’à Casablanca, on a l’impression que de plus en plus de Marocains continuent à être exclus du bien-être social et que la paupérisation est loin de reculer. Bien au contraire. Elle augmente au rythme des inégalités sociales qui, elles, sont de plus en plus criardes. Paradoxalement, les espaces de liberté et de démocratie gagnés au cours de ces dernières années n’ont pas été accompagnés d’une amélioration des conditions de vie du plus grand nombre qui continue à développer une mentalité d’assistanat favorisée par le climat ambiant. Une mentalité qu’il s’agit dépasser par la réhabilitation du culte du travail et de l’effort, et la mise en place de vrais filets sociaux. Comment réduire la fracture sociale et faire en sorte que le Maroc précaire qui est dominant intègre définitivement les espaces de croissance et de richesses ? Ce n’est pas avec des Lois de finances qui se ressemblent depuis des décennies que le Maroc va y arriver. Des Lois de finances taillées sur mesure pour les mêmes lobbies repus au détriment de programmes sociaux dignes de ce nom. Pas étonnant dans ce cas que l’armée des laissées-pour-compte enregistre chaque année la meilleure croissance et que la cohorte des mendiants, chaque jour plus nombreuse, prend d’assaut les espaces urbains comme pour culpabiliser les riches d’être riches et leur rappeler l’immensité du fossé qui sépare les uns des autres. C’est ce cas de conscience qui déclenche en quelque sorte chez le nanti l’acte d’aider. Mais ce n’est pas l’aumône de quelques dirhams qui va faire diminuer la mendicité encore moins faire disparaître le ressentiment social. Un sentiment porteur de tous les extrémismes…

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