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Éditorial : Sentiment de justice

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Mohamed Bouzoubaâ est déterminé à réformer la justice. C’est en tout cas la volonté qu’il a communiquée lors de la conférence de presse qu’il a donnée mercredi 6 août à Rabat en annonçant une batterie de mesures prises par son département. Professionnel du barreau et fin connaisseur des arcanes juridiques et judiciaires, le ministre de tutelle aime opposer au concept de l’indépendance de la justice celui de “juges indépendants“ partant du principe que ce sont ces derniers qui rendent la justice. La philosophie de M. Bouzoubaâ en la matière, c’est que la qualité de tout jugement est fonction des qualités personnelles du juge lui-même. Un juge indépendant suppose aussi qu’il ne soit pas sujet aux influences ou aux pressions de la part du ministère ou de toute autre sphère. L’exemple du juge indépendant par rapport à l’exécutif est fourni par la France à travers le juge d’instruction ou ce qu’on appelle le petit juge. Ce dernier ne juge pas, il est chargé d’instruire à charge ou à décharge les affaires de crime mais aussi de blanchiment d’argent et de détournements de fonds. C’est lui qui décide de la mise en examen et de la détention provisoire du mis en cause quel que soit son rang. Au Maroc où la séparation des pouvoirs n’est pas claire et où les malversations financières sont légion , les choses sont différentes. Les citoyens sont toujours étonnés de voir leurs gouvernants continuer à ne pas comparaître devant la justice. Et quand il arrive que la justice se penche sur le cas de détournement de fonds publics avérés ( le cas du CIH est emblématique), les prévenus crient à la chasse aux sorcières et aux règlements de compte pour échapper à la sanction. Le gouvernement Jettou, qui a récemment anticipé en étouffant certains scandales financiers comme ceux de la Sodea/Sogeta, de la BNDE et de la BMAO, a fini par céder à la pression politico-économique en relaxant l’ensemble des accusés pour la plupart des ex-dirigeants illustres du CIH. Seule exception, un client de cet établissement du nom de Mohamed Feggane. Celui-ci croupit en prison depuis plusieurs années en attendant que la Cour spéciale de justice statue sur son cas. Mohamed Feggane, qui est, du reste, prêt à rembourser sa créance, doit-il payer pour tout le monde, pour ceux qui ont réellement dilapidé le patrimoine financier du CIH ? Au-delà des maux qui minent l’appareil judiciaire marocain et qui sont présentés comme un frein à l’investissement, la justice doit pouvoir s’appliquer à tout le monde, abstraction faite du statut du justiciable. Les actions réformatrices mises en route par Mohamed Bouzoubaâ doivent concourir à installer un sentiment de justice dans la société. C’est à l’aune de ce sentiment que se mesureront l’efficacité et la portée de toute entreprise de refonte de l’appareil judiciaire. Fille aînée de la démocratie, la justice au Maroc a beaucoup de chemin à parcourir et d’obstacles à dépasser pour qu’elle s’impose à tous de manière démocratique et naturelle.

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