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La genèse extrémiste : l’itinéraire marocain

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Il y a près de 34 ans que la première formation d’un courant islamiste au Maroc a vu le jour : « Le mouvement de la chabiba islamia ». Son fondateur, Abdelkrim Moutiî, voulait emprunter le même sentier idéologique du fondateur des « Frères musulmans » en Egypte, Hassan Al Banna. Cette Formation était composée de deux sections : la section de la daâwa (appel à l’islam, éducation spirituelle, pratique des rites religieux…) et la section du jihad dont la mission consistait à la liquidation physique des gauchistes et des occidentalisés de l’époque et qui s’est terminée par l’assassinat du leader socialiste Omar Benjelloun en 1975. C’était le premier acte terroriste commis au nom de l’islam au Maroc qui a coûté à Moutiî une condamnation à mort par contumace. Au-delà des tenants et des aboutissants de l’affaire en soi, cette expérience a été dure pour les membres de ce mouvement dont la plupart ignoraient les vrais desseins de l’organisation. En fait, la Chabiba islamia comptait reproduire le scénario de l’orient, à savoir la confrontation directe avec le régime. Ce qui a conduit à la dissidence d’ un nombre important de ses membres. Afin de marquer la rupture avec l’organisation de Moutiî, ils ont fondé un mouvement sous le nom de « Association de la jamaâ khayria » dans un premier temps pour devenir après « Al Islah wattajdid ». Les dissidents comptaient ainsi intégrer l’action politique officielle, selon la légalité constitutionnelle. Dans les années 90, nouveau changement d’appellation. Elle devient « Attawhid Wal Islah », dont les membres vont se rallier au parti du docteur Abdelkrim Al Khatib pour éclore de l’actuel PJD (parti de la justice et du développement). Parallèlement, cheikh Yassine fondait également sa propre organisation, après avoir décliné auparavant une offre de Moutiî qui consistait à « unifier et agrandir » le Mouvement islamiste. Jusque-là, les islamistes marocains étaient ainsi structurés et connus des autorités. Ce n’est qu’après l’effritement du Bloc des pays de l’Est, et la disparition de l’URSS, qu’un nouveau modèle d’intégrisme commença à voir le jour dans notre pays. Il s’agit des marocains « afghans », qui s’étaient engagés pour le jihad à côté des Moudjahidines de l’Afghanistan. Ils sont entraînés au maniement d’armes et d’explosifs et dressés pour tuer jusqu’à se faire tuer. Une partie de cette nébuleuse, en quête davantage de jihad, avait préféré faire un détour en Bosnie, tandis que les autres rentraient au Maroc, avec leurs barbes et habits à la Taliban, ainsi qu’une nouvelle doctrine basée sur la violence comme seule issue de tous les problèmes. C’est la manifestation organisée en 1991 par Al Adl Wal Ihsane pour le soutien de l’Irak contre l’alliance internationale sous l’égide des USA qui allaient éveiller désormais la vigilance des services de sécurité face au danger qui menace tout le pays. Avec ce qui se passait chez nos voisins, il y avait vraiment de quoi s’inquiéter. Sentant l’étau se resserrer, les intégristes recourent à une autre forme d’organisation et d’épanouissement, soi-disant pacifique : les associations de bienfaisance. Sous le masque d’oeuvres charitables ( distributions d’aide alimentaires et vestimentaires, organisation d’opérations de circoncision d’enfants issus de familles démunies, des rations de f’tours durant le mois de ramadan…), l’araignée extrémiste tissait tranquillement sa toile à travers les différentes régions du Royaume, avec comme cibles principales, les bidonvilles et les quartiers périphériques où la pauvreté et le désespoir atteignent leur paroxysme. Ce sont les semences qui allaient germer par la suite donnant naissance à cette mosaïque de petits groupes dangereusement criminels. Comme des champignons dans la prairie, les Jamaâ sortent de partout et de nulle part. « Assalafia Jihadia », « Attakfir Wal Hijra», « Addaâwa wattabligh », « Assirate Almoustaqime », dont la majorité des dirigeants, malgré leur encadrement par des théoriciens attitrés (Abou Hafs, Fizazi et consorts), sont ignorants ou d’un niveau d’instruction très borné et facilement liés, de près ou de loin à l’organisation d’Al Qaïda. Oussama Ben Laden est leur idole, leur exemple suprême du jihad et du combat de l’impiété. Même les grades et les nominations sont calqués sur l’Orient en passant par l’Algérie (Emir, chef de branche, chef de cellule, chef de famille…) Et pour plus de désinformation, des campagnes médiatiques sont organisées pour que les chefs spirituels et les exécutants se renient les uns les autres à coup de longues manchettes accusatrices et décridibilisantes. Ce qui fait que les cartes sont demeurées extrêmement brouillées, jusqu’à la surprise générale provoquée par les attentats du 16 mai à Casablanca.

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