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La nouvelle loi est une fausse couverture

ALM : En tant que président de la CGEM, comment jugez-vous la décision de la Fédération des assurances d’augmenter de 132% la prime de l’accident de travail ?
Hassan Chami : Cette décision est une application littérale de la nouvelle loi sur l’accident de travail. Il s’agit en somme des effets mécaniques des dispositions prévues dans cette loi sur l’entreprise marocaine. Nous ne sommes pas contre le principe de la généralisation de la protection des salariés contre les accidents de travail. Mais encore faut-il tenir compte des capacités de chaque entreprise. Telle qu’elle est conçue, la loi traite l’ensemble des entreprises marocaines comme un tout indivisible. Il s’agit là d’une mutualisation qui pénalise à plus d’un égard beaucoup d’entreprises, déjà en mauvaise posture. Le mieux aurait été de traiter cette problématique au cas par cas. D’autant plus que, intervenant dans un contexte où le Maroc fait du libéralisme économique son cheval de bataille, cette décision nous semble d’un ordre monopolistique.
Les assureurs peuvent-ils procéder à une révision de la tarification sans l’aval du ministère des finances ?
Les assureurs ne font qu’appliquer la loi. Ce qu’il y a, c’est que cette même loi contient de graves distorsions. Nous en avons discuté au sein de la CGEM lors de notre dernier conseil national et nous n’avons pas manqué de dénoncer certaines de ses dispositions. Nous avons aussi attiré l’attention du gouvernement sur la gravité de la mise en place d’un tel schéma d’indemnisation. Un schéma basé sur le principe de réparation intégrale des victimes, même quand celles-ci gardent toutes leurs facultés. Cela revient à dénaturer la portée sociale de la couverture accident de travail et ne profite ni à l’employeur ni à l’employé. C’est une fausse couverture.
A votre avis, quelles en seraient les incidences sur les entreprises, notamment les PME ?
Il va de soi que les incidences ne peuvent être que catastrophiques. Nous risquons plus que jamais de tomber dans un piège que nous essayons de toutes nos forces de combattre. Celui que les entreprises, surtout les petites et moyennes structures, ne se voient pas obligées de tomber dans l’informel.
Avez-vous été consultés avant que la loi ne soit élaborée ?
Oui, et nous avons d’ores et déjà tiré la sonnette d’alarme. Au lieu de favoriser la création d’emplois dans le pays, cette loi risque de constituer un frein à la capacité de recrutement des entreprises. C’est une situation dramatique. A cela s’ajoute le fait que l’augmentation du taux de remboursement risque d’entraîner une démultiplication des déclarations d’accidents de travail. Et c’est l’entreprise qui s’en trouve la plus lésée. Au lieu d’être une loi sociale qui garantit à tout un chacun ses droits, cette loi risque d’entraîner l’effet inverse et se transformer en une loi anti-sociale.
Et que comptez-vous faire pour contrer son application ?
Comme je vous ai dit, nous n’avons cessé de critiquer cette loi. Avant et après son élaboration. Nous ne pouvons maintenant qu’attendre que le nouveau gouvernement soit constitué afin de relancer le débat.
Dans aucun autre pays, qu’il soit développé ou non, le taux d’indemnisation n’atteint les 100 %. Et nous comptons bien engager des négociations avec les instances de tutelle pour ramener ce taux aux normes appliquées internationalement.
La Fédération des assurances fait également partie de la CGEM. Peut-on parler d’un conflit interne dans ce sens ?
Absolument pas. La Fédération des assurances fait certes partie de notre institution, mais elle a son propre terrain d’activité, son propre territoire. Avec les autres fédérations, nous avons essayé de trouver un compris. Mais aucune issue n’était possible puisque chacun dispose de ses propres arguments et campe sur ses positions. Il n’y a pas de compromis possible.

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