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Laâyoune : Qui veut museler la télé ?

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Le torchon brûle entre la fraîchement créée Télévision de la RTM régionale pour les provinces du Sud et certains élus locaux de la ville de Laâyoune. Cinq mois à peine après son lancement, la télévision régionale est l’objet d’une tentative de déstabilisation qui ne dit pas son nom.  En témoigne la véritable cabale dont le directeur de la chaîne, Mohamed Larhdaf Eddah, fait actuellement l’objet de la part de certains élus de la ville. Mieux encore, une campagne  de collecte de signature est menée depuis quelques semaines. Quelque 40.000 signatures seraient ainsi dans le sac. Objectif : la tête de M. Laghdaf. Ce dernier est accusé de tous les maux. Le plus grave d’entre eux est -rien moins que cela – celui de porter atteinte à la cause nationale et de servir les thèses des séparatistes (!).  
Le conflit date depuis le lancement même de la chaîne, le 6 novembre 2004. Cette dernière, par la liberté de ton adoptée d’entrée, par la parole qu’elle accorde aux différentes catégories de la population, les protestataires de tous genres compris, en a  dérangé plus d’un. La goutte qui a fait déborder le vase est tombée il y a quelque semaines. Un conflit social entre vétérinaire et chevillards éclate. En reportage dans les abattoirs de Laâyoune pour couvrir l’événement, l’équipe de la chaîne  se voit sommée de rendre la cassette des enregistrements. L’équipe refuse. Ordre est donné de ne pas la laisser quitter les lieux. L’équipe sera séquestrée dans le parking des abattoirs durant trois heures et ne devra son salut qu’au sit-in de solidarité improvisé sur les lieux par un groupe de journalistes. Ces derniers étaient venus couvrir la visite à Laâyoune d’une délégation espagnole venue inaugurer l’ouverture du bureau régional de la Macronésie. La situation se débloque.
Le Syndicat national de la presse marocaine (SNPM) intervient et condamne ce qu’il qualifie d’atteinte aux droits des journalistes. Mais si pour la chaîne, le travail a été accompli de manière professionnelle et dans les règles de l’art, « en donnant la parole au vétérinaire et aux chevillards ainsi qu’à un responsable de la municipalité », le Conseil communal, lui, avance que la télé ne disposait pas d’autorisation. Pour le même Conseil, et par la voix de son vice-président, Hamdy Khelli Henna, cité par notre confrère TelQuel, la manière de travailler de la chaîne régionale est en elle-même une menace à tout ce qui a été bâti pendant 30 ans dans les provinces du Sud.  Pour lui, la chaîne véhicule des idées anti-patriotiques. Une  affirmation qui reste à nuancer. Journaliste jusqu’à la moelle, Mohamed Larhdaf avait annoncé la couleur dès le départ. A ses yeux, la chaîne, lancée dans la précipitation en novembre dernier, ne devait pas être une RTM bis, ni servir de canal officiel, loin de là. Asseoire la chaîne, c’est la rendre crédible, aux yeux de tous, à Laâyoune comme à Tindouf. Couvrant la moitié du territoire national, avec de petits moyens, une petite équipe, la chaîne, baptisée Laâyoune TV dans un premier temps, est regardée, scrutée. Information de proximité, animations musicales et dédicaces qui vont au-delà du Maroc, l’équipe Larhdaf attire l’attention de toute la population des provinces du Sud. La parole n’est pas l’apanage des canaux officiels. Bien au contraire, les critiques à l’action des élus représentent 90% des diffusions de la chaîne. D’une télé vouée à un succès limité, la Télévision de la RTM régionale pour les provinces du Sud force bien des portes, à commencer par celles des élites locales, peu habituées aux dérangements de ce genre. Les élites locales,  mais aussi le front polisario, une bonne partie du territoire algérien et la Mauritanie. A tel point que certains voyaient  en elle un «risque d’influencer ou de réduire le rayonnement politico-culturel de la Mauritanie» dans la région, comme l’a estimé un ancien ambassadeur mauritanien dans un article publié récemment  par le quotidien privé «Nouakchott Info». La chaîne reçoit également, et c’est le plus important, des fax et appels téléphoniques d’Espagne, de Mauritanie et d’Algérie. Certains, les polisariens en premier, qualifient son équipe de
« traîtres ». D’autres vouent à la télé un véritable culte.  C’est dire que sa place est méritée, son rôle prouvé, sa ligne éditoriale, efficace. La question à poser reste liée aux enjeux que masque un débat qui part de la cause nationale pour aller droit dans les intérêts bassement personnels de certains. 

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