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L’approche démographique d’Emmanuel Todd

Ce qui fait l’originalité du livre d’ Emmanuel Todd, « Après l’Empire, essai sur la décomposition du système américain », traitant de l’évolution géopolitique de la planète, est sans doute l’usage que fait l’auteur des ressources de la science démographique.
Contrairement à Jean-Ziegler ( Les nouveaux maîtres du monde , 2002) qui identifie, analyse et critique l’idéologie de la mondialisation, à la manière d’un philosophe très au fait des plus récentes données sociologiques et économiques, Emmanuel Todd puise dans son expérience d’historien et de démographe. Il interprète des données statistiques révélatrices de plusieurs aspects du monde contemporain qui échappent à l’ observation superficielle. Le résultat est parfois étonnant, car il ouvre des perspectives nouvelles qui favorisent une meilleure compréhension de l’évolution de la planète.
«Emmanuel Todd a une approche différente aussi d’autres analystes contemporains comme, nommément, Noam Chomsky «L’An 501», (1995) qui fait la critique de la conquête anglo-saxonne au cours des cinq derniers siècles, à travers une abondance de faits historiques », estime Claude Collin dans une note de lecture du livre. Il diffère aussi de Peter Scowen «Le livre noir des Américains » (2002), qui relève l’historique des points noirs de la politique extérieure des Etats-Unis. Aspect surprenant de sa démarche, outre les paramètres démographiques auxquels il a souvent recours, Todd cherche à comprendre l’évolution des Etats-Unis à partir de la pensée des principaux théoriciens américains comme Brzezinski, Paul Kennedy, Huntington, Kissinger, Robert Gilpin et Fukuyama.
Selon Emmanuel Todd, si l’on se penche sur les principaux paramètres démographiques, c’est-à-dire l’alphabétisation de masse et le taux de natalité, on se rend compte, par exemple, que la notion de terrorisme est un mythe qui n’est utile qu’à l’Amérique, dans la mesure où celle-ci a besoin d’un Ancien Monde enflammé pour se donner l’illusion d’être le centre du monde.
De plus, lorsque les hommes et les femmes savent lire et écrire, ils commenceront à contrôler leur fécondité. En 1980, l’indice mondial de fécondité (IMF) était de 3,7 par femme. En 2001, il était de 2,8. À ce rythme, la population mondiale sera stationnaire vers 2050. Todd dresse un tableau de la fécondité des principaux pays dans le monde. Fait surprenant, on voit que le monde musulman, en tant qu’entité démographique, n’existe pas. Car la dispersion des taux dans plusieurs pays arabes est maximale allant de 2 enfants à 7,5. Il n’y a donc pas de correspondance avec l’Islam. Un autre aspect remarquable de la révolution culturelle réside dans le fait qu’elle s’accompagne la plupart du temps d’une explosion de violence idéologique que Todd appelle «crise de transition». Ce phénomène n’est pas le fait du seul tiers monde. Il s’est manifesté en Europe : l’Angleterre décapite son roi en 1649, la France en 1789, la Russie en 1917. Au nom de Dieu, on s’est entretué en Angleterre au XVII è s. « Le Djihad au nom d’Allah des années récentes n’est pas, dans toutes ses dimensions, d’une nature différente. (…) La violence, la frénésie religieuse ne sont que temporaires. » p. 46
On peut donc admettre la séquence suivante : alphabétisation-révolution-baisse de natalité. Elle constitue un aspect important d’une conception de l’Histoire.

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