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Le degré zéro de la politique

© D.R

Ce qui se passe actuellement au Maroc, à l’occasion des élections des présidents des communes et des mairies, est grave. Le mot est à n’en pas douter, trop faible pour refléter fidèlement la réalité. En fait, il s’agit d’une chute libre d’un tigre en papier, qu’on appelait les forces politiques. A Rabat, Omar Bahraoui du Mouvement populaire, avec initialement 13 sièges, est arrivé, à arracher la mairie de la ville en dressant l’Istiqlal (11 sièges) contre l’USFP ( 17 sièges) et brisant les rangs du PPS ( 7 sièges). Les scènes rediffusées dans les chaînes de télévision se passent de tout commentaire. La capitale du royaume, connue pour son calme en termes de confrontations partisanes, s’est transformée en un espace de rixe dans lequel se sont effrités les uns après les autres bloc de la Koutla, la coalition de la majorité gouvernementale et parlementaire, et la solidité des rangs d’un des plus anciens partis du Maroc, le Parti du progrès et du socialisme. Ahmed Rih, candidat de l’USFP, déchu, n’a pas manqué d’épingler ses frères ennemis de l’Istiqlal. «Nos alliés présumés ne nous ont pas permis de s’asseoir autour d’une même table de négociation. Ils ne nous ont pas donné cette occasion. Certains d’entre eux ont désobéi aux instructions parce qu’ils ont été achetés ou on leur a donné des promesses, etc.», a-t-il déclaré à notre confrère Libération. A Marrakech, la coalition de l’Istiqlal avec ses 15 sièges et l’USFP qui dispose de 11 sièges, n’a pas pu s’imposer. Les deux partis ont crié au scandale et se sont laissés prendre dans les filets d’un Omar El Jazouli, qui a pu réunir à ses côtés 40 voix, alors que son parti, l’Union constitutionnelle, n’a remporté que 5 sièges lors du verdict du 12 septembre. Descartes n’est pas marocain. Ahmed Khalil Boucetta, membre du Comité exécutif de l’Istiqlal, dira à ce sujet que la séance du 19 septembre, constitue un coup dur à la démocratie. A Meknès, le RNI, qui ne cesse de se proclamer du libéralisme progressiste, appuie le PJD contre le PPS. Dans une salle sous haute surveillance, les islamistes s’emparent du Conseil de la ville A Agadir, ce même RNI porte son soutien à Tariq Kebbaj de l’USFP. A El Jadida, l’ironie du hasard a voulu que les gens qui ont été arrêtés pour tentative d’influencer l’opération de vote du bureau de la commune, par des moyens illégaux, sont ceux-la même qui furent élus à la tête de l’instance municipale. A Mohammédia, Casablanca, les élections se déroulent dans un climat de tension, qui ne diffère en rien de celui de El Jadida, etc… Dans la ville de Nador, les choses étaient plus simple. A défaut d’une majorité, le candidat Tariq Yahya, jeta les bulletins de vote, démontrant ainsi que la loi n’a aucune valeur aux yeux de certaines personnes lorsqu’elle s’interpose entre eux et leurs désirs. Bref, le dénominateur commun, qui se dégage de ces lieux de mille feux, n’est autre que la primauté du sectarisme et des manoeuvres de bas étages au détriment des principes de démocratie. De Tanger à Lagouira, la magouille semble devenir un sport national dans le champ politique. Pourtant, avant le 12 septembre, tout portait à croire que le Maroc était en voie de la consolidation de son édifice démocratique. La démission de la raison et de la logique dans les alliances constatées à cette occasion est plutôt synonyme de la fin d’une période. Le vieux est en passe de mourir, mais le neuf n’arrive pas à naître. La démission des états-majors partisans, l’effritement prématuré des alliances, aussi bien au niveau des grands blocs traditionnels, Koutla et Wifak, ainsi que des coalitions antagoniques de la majorité et de l’opposition, et l’absence de contrôle des troupes partisanes, sont autant de signes annonciateurs. Mais, dans toutes ces acrobaties, le vide politique demeure non seulement un facteur structurel, mais un indice du fossé qui se creuse de jour en jour entre les citoyens et ceux qui se proclament comme porte-parole politique du peuple et représentants de la Nation. Les traits généraux du tableau se dessinent déjà. Dans bon nombre de régions, l’intérêt public fut sacrifié sur l’autel des ambitions personnelles de certains élus. Aussi, au lieu que les instances élues locales traduisent le sens global de la volonté populaire, elles sont devenu des nids de pieuvres. A qui incombe la responsabilité? Aux partis politiques d’abord. Un constat amer qui traduit le retard du politique par rapport au monde des Finances et de l’Economie où les acteurs répondent logiquement aux attentes de leur milieu. Mais, faut-il dire encore que tout le monde est responsable ?

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