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Le spectre d’Al Qaïda plane sur Madrid

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Les citoyens espagnols se sont rendus, hier, aux urnes pour élire ceux qui doivent gouverner le pays durant les quatre prochaines années. 350 députés et un chef du gouvernement qui devrait succéder au président sortant, José Maria Aznar, qui se retire de la vie politique après huit ans passés à la tête de l’exécutif espagnol.
Les électeurs, qui se sont dirigés aux urnes pour la neuvième fois depuis la transition démocratique, l’ont fait sous l’effet de choc suite aux attentats terroristes de jeudi dernier à Madrid qui ont fait 200 morts et plus de 1500 blessés et les révélations sur les scandaleuses tentatives de manipulation de l’information de la part du gouvernement sur les vrais coupables.
Ainsi, après deux jours de tentatives répétées d’imputer les attentats qui ont frappé les principales gares ferroviaires de la capitale aux activistes basques de la bande terroriste de l’ETA, le gouvernement Aznar a fini par reconnaître, samedi soir l’existence de données impliquant le réseau européen de la nébuleuse terroriste islamiste d’Al Qaïda. Pendant, les deux premiers jours, les déclarations des responsables espagnols attribueront les attentats à l’organisation terroriste basque et ce malgré les avertissements des services de sécurité.
Ce fut le ministre de l’Intérieur, Angel Acebes, qui annonça lors d’une conférence de presse, la deuxième en mois de trois heures, l’interpellation de cinq personnes dans le cadre de l’enquête sur les attentats du 11 mars. Il s’agit de trois Marocains et de deux Espagnols d’origine indienne. L’arrestation des cinq individus a été possible grâce aux investigations menées par les services de sécurité espagnols sur la puce du téléphone mobile qui devait servir de commande à distance du détonateur d’une bombe qui n’a pas explosé et que les enquêteurs avaient trouvée à bord d’un train. Malgré ses appels à la réserve, la déclaration d’Acebes augurait déjà d’un changement radical dans le cours de l’enquête. La piste de l’ETA, jusque-là privilégiée par les membres du gouvernement dans leurs déclarations, allait être abandonnée au profit de la piste islamiste. En effet, quelques heures plus tard, le titulaire de l’intérieur allait convoquer les journalistes pour leur annoncer la réception d’une cassette-vidéo portant revendication par Al Qaïda des attentats du jeudi noir.
C’est un appel reçu par la chaîne de télévision régionale Télé Madrid qui fut à l’origine de la découverte par les services de police du document qui avait été déposé dans une poubelle sise à quelques mètres d’une mosquée à Madrid. « C’est une revendication faite par un homme parlant arabe avec un accent marocain. Il fait la déclaration au nom de quelqu’un qui se présente comme le porte-parole militaire d’Al Qaïda en Europe, Abou Doukhan Al Afghani », a annoncé le ministre avant de rajouter que « ce nom est inconnu des autorités espagnoles ou des services d’espionnage étrangers à qui l’Espagne a demandé de l’aide ». La cassette ne sera pas diffusée, mais une transcription sera distribuée aux journalistes. « Nous déclarons notre responsabilité sur ce qui s’est passé à Madrid, exactement deux ans et demi après les attentats de New York et Washington (…) C’est une réponse à votre coopération avec les criminels, Bush et ses alliés (…) Si vous ne cessez pas vos injustices, du sang sera encore versé et ces attaques ne sont en rien comparables à ce qui pourrait arriver avec ce que vous appelez terrorisme », disait le prétendu porte-parole. Suite à ces développements, notamment l’implication de citoyens d’origine marocaine, les autorités espagnoles ont aussitôt sollicité l’aide de leurs homologues marocains. Ce à quoi, le gouvernement marocain a répondu favorablement en envoyant une équipe formée par des experts de haut niveau en matière de lutte antiterrorisme de la direction de la surveillance du Territoire (DST), de la Direction générale des études et de la documentation (DGED) et des Renseignements généraux de la direction Générale de la sûreté nationale (DGSN).
Aussi, la coopération entre les services de sécurité des deux pays permettra-t-elle d’identifier les trois détenus marocains. Il s’agit, selon un communiqué officiel marocain, de Jamal Zougam, employé de bureau âgé de 30 ans, de Mohamed Bekkali, mécanicien de 31 ans, et de Mohamed Chaoui, ouvrier de 34 ans.
Rappelons que le premier avait été interpellé par le juge antiterroriste, Baltazar Garzon dans le cadre de l’affaire de la cellule espagnole d’Al Qaïda démantelée en novembre 2001. Les enquêtes avaient alors prouvé que Zougam avait séjourné pendant une longue période chez Abdelaziz Benyaïche actuellement en état d’arrestation en Espagne et dont le frère, Salaheddine est incarcéré au Maroc pour son implication dans les attentats du 16 mai à Casablanca. Selon ces données, l’on peut déjà établir un lien entre les attentats perpétrés dans la capitale économique du royaume et ceux de la capitale espagnole.
L’établissement de ce lien devrait inciter le prochain locataire de la Moncloa (Présidence du gouvernement espagnol) à oeuvrer pour une meilleure coopération entre les services de sécurité des deux pays à l’encontre de la politique adoptée par son prédécesseur, José Maria Aznar, qui voulait s’ériger en gendarme du détroit. Ce dernier quitte le monde de la politique de son pays par la petite porte après avoir couronné son deuxième et dernier mandat en mentant au peuple espagnol.

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