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Les 12 commandements pour redonner confiance

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Le Maroc, qui a entamé un processus de légifération de tout au long du siècle dernier, a mis en place un arsenal juridique comportant notamment les codes et lois régissant la concurrence, la distribution, la lutte contre la fraude… en somme, un cadre global de droit économique.
Ainsi, la liberté d’initiative et l’encouragement des échanges et des transactions commerciales ont amené notre pays à promulguer le Dahir du 12 août 1913 régissant les obligations et contrats (DOC), le commerce, l’immobilier… passant par le plan de redressement structurel entamé au début des années 80 dans le cadre des grands équilibres.
D’autres mesures et réformes accompagnatrices, telle la loi 24-86 concernant les coopératives, ainsi que la réforme fiscale et finalement la Constitution de 1996 qui a scellé la liberté des initiatives.
L’arsenal législatif ayant concerné l’investissement, les sociétés, la propriété industrielle, les petites et moyennes entreprises (PME), la réorganisation des marchés financiers, prouve l’intérêt accordé par le Maroc à la consolidation des organes de régulation juridique de l’économie.
Cependant, le secteur des services reste le parent pauvre de ce processus. Il n’a pas fait l’objet d’une stratégie de mise à niveau ni bénéficié de mesures accompagnatrices permettant au consommateur marocain d’exercer ses choix et de disposer d’offres de services à la hauteur de ses aspirations.
En effet, bien que les services représentent actuellement, selon des statistiques mondiales, plus de 60% de l’ensemble de la production et de l’emploi, l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) a introduit une révolution dans le monde des services, surtout dans les secteurs bancaires, de l’e-commerce (commerce électronique), de l’enseignement à distance, la vidéo-conférence et la télé-médecine. Ces nouveaux secteurs d’activités et de services ont ouvert la voie de la concurrence dans des sphères jadis contrôlées, monopolisées et gérées par l’Etat en tant que secteur public à caractère industriel et commercial (SPIC).
C’est dire que le Maroc a consacré toute une panoplie de mesures et de dispositions législatives pour organiser et réguler uniquement son économie et non protéger son consommateur qui reste la proie facile et la première victime.
Aujourd’hui, la mondialisation a aboli les barrières douanières au profit de mesures de contrôle sanitaires visant la protection du consommateur.
Le réceptionnaire des services dénué de toute expérience, n’est pas outillé pour effectuer les choix judicieux devant le phénomène de la publicité mensongère et les ventes agressives dans le cadre ce qui est communément connu sous le nom de «services interactifs».
Le monde s’organise à sa guise et la mise en place de nouveaux outils dans les domaines se rapportant notamment aux secteur de transport, de l’audiovisuel, la concurrence, le contrôle de la qualité, désormais gérés par des instances spécialisées privées, est aujourd’hui une réalité.
Dans ce capharnaüm, quelle est la place du consommateur marocain? Quels sont ses droits, ses obligations et quels sont ses choix?
Généralement contraint et ne bénéficiant pas de la liberté de choix, il est tenu, en dépit de l’existence de la loi sur la concurrence 6/99, devant la publicité mensongère et le monopole exercé par l’Etat (ex. l’ONCF et RAM) de subir et se taire. C’est dire que la loi en question, à elle seule, ne peut assurer et préserver les droits du consommateur.
L’article 91 donnant, certes, le droit aux associations de consommateurs d’agir au nom de ceux-ci, est néanmoins caduc alors et surtout qu’il impose la condition d’utilité publique, condition qu’aucune association au Maroc n’a pu avoir à ce jour.
Les consommateurs marocains qui sont aujourd’hui confrontés à de sérieux problèmes au niveau de la prestation des services, liés à la multiplication des documents contractuels quotidiens et à la technicité croissante de leur contenu, doivent être en mesure d’en comprendre la portée et de saisir les nuances des clauses qui leur sont applicables. Aujourd’hui, tous les citoyens marocains, en particulier, ceux qui ont un revenu limité, sont en droit de réclamer la mise en place d’un programme intégré à l’amélioration de la qualité des services, notamment dans les zones rurales qu’urbaines.
Ce programme peut s’articuler autour de douze commandements suivants :
1- Distribution équitable des services de façon à rétrécirer l’écart entre villes et campagnes et à préserver les terres agricoles.
2- Relier en grande partie tous les villages et douars au réseau d’eau potable et d’évacuation des eaux usées.
3- Procurer l’électricité et l’éclairage public à tous les douars qui n’ont pas encore été électrifiés jusqu’à présent.
4- Procurer des logements décents et économiques aux citoyens ayant des revenus limités et construire les espaces sportifs (infrastructures).
5- Veiller à la propreté des villes et des villages et mettre en place un plan de collecte des déchets avant leur accumulation et protéger l’environnement et lutter contre les pollutions.
6- Restructurer le secteur des transports, tout en subventionnant les couches les plus démunies et les étudiants – en ce sens, encourager la création de sociétés de transport en commun et organiser le service des taxis collectifs afin d’offrir un service de qualité en matière de transport et sensibilisation aux règles de la bonne conduite.
7- Activer l’entrée en vigueur du programme d’assistance à tous les citoyens (couverture sociale), amélioration de la qualité des soins et perfectionnement des préventions contre les maladies.
8- Entretenir et élargir le réseau routier national.
9- Restructuration intégrale du code des impôts en vue d’y introduire des concepts modernes d’équité et d’adaptation en matière de fiscalité.
10- Procéder à une reforme structurelle et financière du secteur bancaire.
11- Moderniser et simplifier les services offerts aux consommateurs, afin de mettre fin à la bureauctrie et aux déviations (simplification des démarches–informatisation des procédures administratives, établissement des liens électroniques entre les diverses institutions étatiques et privées.
12- Œuvrer pour le renforcement du système judiciaire, moderniser les procédés de jugements et leur application.
Au demeurant, le développement des services doit obligatoirement s’accompagner d’une restructuration des secteurs qui supervisent leur création, leur fonctionnement et leur entretien et ce par la décentralisation de la planification, de l’exécution de la gestion.
Il doit également s’accompagner de la création d’entités organisationnelles qui supervisent les services qui délivrent les permis nécessaires pour le fonctionnement et l’entretien, contrôlent la qualité des services et fixent les modalités et tarifs des services en fonction des coûts et des revenus.
Déterminés et optimistes, les consommateurs marocains entament cette nouvelle année avec foi en le potentiel de la société marocaine, ainsi qu’en ses institutions sacrées afin de construire un avenir meilleur pour les fils de cette noble patrie.

• Par Me Mohamed Belmahi
Président de la ligue nationale De protection des consommateurs au Maroc

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