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Les eaux de la guerre et des dissensions

Le Soudan, l’Ethiopie et l’Egypte se disputent l’eau du Nil. Le bassin du Jourdain est au coeur du conflit entre Israël et les Palestiniens. Les bassins du Tigre et de l’Euphrate sont convoités par la Turquie, la Syrie et l’Irak. La Chine est en conflit avec le Laos et la Thaïlande au sujet du Mékong et avec la Russie au sujet du fleuve Amour. L’ONU a recensé 300 zones potentielles d’hydro-conflits.
Selon le géographe américain Aaron Wolf, la plus ancienne guerre de l’eau remonte à 4 500 ans. Elle a opposé deux cités mésopotamiennes à propos du Tigre et de l’Euphrate, dans le sud de l’Irak actuel. Depuis, l’eau a souvent été à l’origine des conflits qui secouent certains pays, comme l’Inde et le Pakistan ou Israël et les Palestiniens.
En 1979, après l’accord de Camp David, le président Anouar Sadate déclarait, à propos du Nil, que «l’eau était le seul mobile qui pourrait conduire l’Egypte à entrer de nouveau en guerre». Le roi Hussein de Jordanie aurait dit presque la même chose en 1990, à propos du Jourdain. Mais tous les deux voulaient faire entendre à qui de droit qu’ils n’étaient pas prêts à livrer batailles pour des raisons politiques ou de frontières, encore moins pour la cause panarabe.
Pourtant, au cours des 5 décennies du dernier siècle, l’eau était à l’origine de l’embrasement de 37 batailles, dont 27 concernaient Israël et la Syrie, à propos du Jourdain et du Yarmouk.
Les problèmes les plus graves concernent le Tigre et l’Euphrate, ainsi que le Jourdain. Tous les pays limitrophes ont soif. Ils ont aussi les moyens de détourner l’eau de leurs voisins, avec qui ils sont déjà à couteaux tirés, selon l’expression de A. Wolf. La Turquie, par exemple, prévoit la construction de 22 barrages et de 19 centrales électriques sur le Tigre et l’Euphrate, ce qui pourra lui permettre de multiplier par quatre sa superficie irriguée.
Il n’est donc pas aléatoire ni arbitraire d’annoncer que le Tigre et l’Euphrate constituent une véritable poudrière. Car sur le plan hydraulique, l’Euphrate ne permet l’irrigation de 2,5 millions d’hectares ; alors que les besoins des trois pays concernés, en l’occurrence la Turquie, la Syrie et l’Irak, en terres irriguées dépassent les 4 millions d’hectares.
Bien entendu, les premières négociations tripartites sur l’exploitation en commun des eaux des deux fleuves précités a commencé dès 1965, après plusieurs pourparlers bilatéraux. Mais jusqu’à présent, les trois pays agissent conformément à des accords tacites, particulièrement celui des années 1970, que la Turquie, tout en construisant des barrages, continue de respecter.
La Syrie et l’Irak reconnaissent, à cet effet, l’utilité de ces barrages, qui régularisent le flux du fleuve et prolongent la saison agricole, mais persistent à revendiquer une révision du partage en cours. Sur ce, l’on peut comprendre l’une des raisons essentielles du rapprochement entre la Turquie et Israël et le soutien des Kurdes turques par la Syrie. N’est-ce pas l’eau qui était à l’origine des premiers entretiens, à Zurich en 1990 qui donnèrent, en fin de compte, naissance aux accords d’Oslo entre Israéliens et Palestiniens ?
Autre événement non moins important, quand, en 1991, les pays occidentaux ont demandé à la Turquie de bloquer le cours de l’Euphrate vers l’Irak, Ankara, consciente de la gravité de la situation, leur a répondu qu’ils peuvent utiliser son espace aérien et ses bases pour bombarder l’Irak mais elle ne coupera pas l’eau aux Irakiens ».

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