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Les micro-crédits entre appui et profit

La loi est on ne peut plus claire. « Les associations de micro-crédits doivent porter à la connaissance du public, notamment par affichage dans leurs locaux, des conditions appliquées à leurs opérations de micro-crédits, particulièrement en matière de taux d’intérêt de commissions, de frais de dossier et autres à la charge du bénéficiaire de micro-crédit ». C’est ainsi qu’il est stipulé dans l’article 9 de la loi n°18-97, relative au micro-crédit, que toute association de micro-crédit se doit de rendre publics les taux d’intérêt qu’elle applique. Les lois étant plus faciles à lire qu’à appliquer au Maroc, il suffit de faire le tour des différentes associations opérant dans ce secteur pour se rendre à l’évidence que tel n’est pas le cas en réalité. Au risque d’induire le client potentiel en erreur. Surtout quand on sait que ces taux sont particulièrement élevés. Selon Planète Rating, une association comme Zakoura appliquait en 2002 un taux global de 45%. Du jamais vu, nul par ailleurs. Ceci sachant que même les sociétés de crédit à la consommation appliquent le TEG de 14,02% hors taxes. Ce taux sera d’ailleurs revu à la baisse à partir du premier avril 2004, pour passer à 13,95 % HT.
L’écart est donc de taille. Mais souvent, ces pratiques sont masquées par le manque d’informations à destination des clients. Il est accentué en partie à cause de la nature et du profil des personnes à même de bénéficier de ces crédits. Ces clients sont dans la majorité issus du milieu rural, vivant dans une situation sociale précaire et sont surtout analphabètes dans leur grande majorité. Parler en termes de TEG ou autres techniques ou notions relevant du secteur financier et bancaire revient tout simplement à choisir de ne pas se faire comprendre. A cela, on préfère donc le «simple» discours de «vous contractez tel montant, et vous remboursez par tel autre par mois». Un discours qui en charme plus d’un, puisque environ 240.000 personnes ont des micro-crédits en cours au Maroc. Et sachant que les montants contractés vont en moyenne de 650DH à 2.500DH, impliquant par là même des mensualités à remboursements très abordables, ce ne sont pas les arguments pour attirer davantage de clients qui manquent. Et c’est ces derniers qui intéressent le plus les clients. Et ils sont plutôt de bons clients. Il n’y a qu’à voir le taux de « crédits risqués » pour s’en rendre compte. Le niveau de remboursement des prêts est extraordinaire par rapport au risque bancaire habituel. Si les banques classiques essuient des créances qui s’élèvent dans les meilleurs des cas à plus de 12 % de ses encours, celles des associations de micro-crédits ne dépassent guère 0,5%. Chez Al Amana, le taux de crédits risqués varie entre 0,07 et 0,11%. Zakoura obtient un taux de remboursement de 99,7%. Avantage concurrentiel de ces dernières par rapport aux sociétés de micro-crédit et autres banques : elles n’exigent pas autant de garanties que les deux dernières réclament à leurs clients ordinaires.
Clients sûrs, les bénéficiaires des micro-crédits n’en sont pas moins obligés de payer très chers leurs crédits.
Un constat qui force l’étonnement quand on sait que les organismes de micro-crédit n’ont pas pour ambition, vu leur rôle social, de dégager de bénéfices, mais d’aider à en faire dégager à d’autres, les plus défavorisés. D’autant qu’en terme de financement, ces organismes bénéficient à la fois de dons de généreux organismes marocains et étrangers et qu’elle bénéficient de taux préférentiels quand il s’agit de financements bancaires. Comme quoi, ce sont et ce seront toujours les plus pauvres qui paient le plus.

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