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Manhasset III montre les failles structurelles du Polisario

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Personne ne peut, aujourd’hui,  sérieusement avancer que le Polisario est sorti renforcé du troisième round des négociations avec le Maroc à Manhasset. Ce qui s’est passé entre le 7 et le 10 janvier 2008 dans cette banlieue tranquille de New York s’apparente, à l’évidence, à un tournant dans ce processus initié par les Nations Unies et qui vise à sortir la région d’une crise plus que trentenaire. Le Polisario a montré des signes graves de faiblesse, sur le plan à la fois politique et stratégique, et une incapacité évidente à être un partenaire pour la paix.
Commençons par la paix. Négocier en menaçant de reprendre les armes  — une résolution inconséquente du congrès du Polisario à Tifariti —  a privé les dirigeants séparatistes du minimum de crédibilité dont ils pouvaient encore bénéficier auprès des responsables des Nations Unies. On ne peut être dans un processus sérieux, responsable et crédible, suivi avec beaucoup d’intérêt par la communauté internationale, et agir d’une manière «cavalière». Il n’est plus admis à ce niveau précis des relations internationales de demander les dividendes d’une démarche pacifique et d’exiger en même temps les profits d’une surenchère militaire improbable, et surtout irresponsable. Cela ne fait pas sérieux. Et Manhasset III l’a dramatiquement enregistré.
Abordons, maintenant, la question de la guerre au Maghreb. Croire que cette sinistre opportunité relève d’un mouvement, en déshérence, préfabriqué, dit de libération, comme le Polisario, c’est se méprendre sur les raisons réelles qui font que les peuples meurent et vivent. Seules Alger et Rabat, dans un excès de folie inqualifiable, peuvent plonger le nord de l’Afrique —, le flanc sud de la Méditerranée, donc —  dans une déstabilisation aussi dérisoire que criminelle pour le peuple de la région. La guerre et la paix ce sont des affaires d’Etats souverains qui maîtrisent historiquement cet «art» et non pas une occupation même naïvement légitime d’aventuriers qui ont perdu le sens de l’honneur.
Le Polisario, très mal inspiré, depuis qu’il a perdu l’initiative du fait de l’offre de paix marocaine, a commis une faute grave. On ne peut pas agiter décemment le spectre de la guerre dans une région ciblée, massivement et méthodiquement, par le terrorisme notamment salafiste. Ce ventre mou de l’Afrique du Nord qu’est l’espace sahélo-saharien irradie désormais d’une instabilité qui met en péril toutes les capitales de la région. Alger y compris. Que signifie alors dans ce contexte déjà périlleux une reprise des armes par le Polisario, ou l’exercice d’un droit de poursuite marocain sur le territoire algérien — pays lui-même en proie à un terrorisme aveugle —, sanctuaire dérisoire d’une cause artificielle. Cela ne signifie rien. Et c’est cette insuffisance théorique — et politique — qui a été enregistrée partout, et actée notamment à Manhasset. Taieb Fassi Fihri, le ministre marocain des Affaires étrangères, parle à ce sujet de schizophrénie plaçant ce dossier, sans vraiment le vouloir, et à juste titre, dans un registre psychiatrique qui, par ailleurs, surdétermine cette affaire depuis le début.
Dans la même «foulée» intellectuelle, Khalli Henna Ould Errachid, président du Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes (CORCAS), lors de la conférence de presse de clôture des négociations, qui se tient à sa chaque fin d’étape, dans les locaux de la Mission marocaine des Nations Unies à New York, parle, lui, pertinemment, de dédoublement de la personnalité polisarienne. Un discours dedans, à Manhasset, un lieu encadré par l’ONU, et un discours, dehors, à Tindouf ouvert aux vents de la démagogie et de l’imposture. Ailleurs, on exhibe des muscles — chétifs, au demeurant —  et quand il faut discuter à New York, on joue les prolongations. «Le problème du Polisario est psychologique. Il n’arrive pas à prendre acte, à assimiler, à digérer, le nouvel état d’esprit marocain sur le dossier du Sahara. Le Polisario a raté l’analyse du changement de la position du Maroc quand le Royaume a proposé le plan d’autonomie. Il croit que l’initiative marocaine est une manœuvre alors qu’elle est une authentique offre de paix moderne, démocratique et correspondant aux standards mondiaux les plus exigeants en matière d’autonomie territoriale».  Et comme pour renforcer le trait — le tropisme  — psychologisant de Manhasset III, Khalli Henna Ould Errachid remarque que le Polisario, un mouvement qu’il qualifie au passage de totalitaire, s’est heurté au réel, à la réalité. Ce mouvement découvre alors deux choses. La première c’est que le référendum qui mène à l’indépendance est impossible car il n’y a pas de collège électoral possible. Une question à la fois d’identité et de représentabilité. En clair, qui est sahraoui ? Et qui le représente ?  Sur ces deux questions, au moins, le Polisario ne fait pas l’affaire. Au mieux, il fait un tiers de celle-ci. Au pire, il constitue une sensibilité ou une fraction. Dans tous les cas, pas toute l’affaire, dans son entièreté. Les mythes fondateurs s’effondrent, se brisent, au même rythme que la réalité géopolitique s’impose. Le président de la délégation marocaine à Manhasset, le ministre de l’Intérieur Chakib Benmoussa, n’est pas loin non plus de partager, au-delà des positions de principe et de responsabilité, cette analyse quand il affirme que : «dans cette phase particulière de l’évolution des négociations, la responsabilité pleine et entière de l’Algérie est engagée». C’est comme si le ministre de l’Intérieur ne se suffit plus — et tous les observateurs sérieux le constatent — que les qualités de partenaire pour la paix, d’interlocuteur crédible, d’acteur représentatif ne sont plus réunies — l’ont-elles jamais été ? — dans la posture du Polisario. Le Maroc, le Maghreb, et au-delà la Méditerranée, ont toujours eu besoin d’une Algérie, non pas riche — dans ce cas précis la richesse n’est pas une valeur ajoutée ou de génie national, c’est juste une affaire de géologie—, mais d’une Algérie certainement forte, unie et responsable. Or, ce n’est pas le cas aujourd’hui.
L’ersatz de projection de puissance qu’est le Polisario — un rebut de la guerre froide — n’exonère pas l’Algérie de ses vraies responsabilités régionales, ni de ses devoirs historiques de voisinage, ni de ses obligations de fraternité. Il est triste de constater, aujourd’hui, que cette Algérie que nous appelons de tous nos vœux, depuis toujours, est empêtrée dans une transition sans fin prévisible, une mutation sans  lendemain sûr et une évolution incertaine. C’est aussi, et surtout, sur cette réalité qu’achopperont encore les négociations de Manhasset et que se fracasseront les rêves perdus du Polisario. Mais au final , il va bien falloir un jour que l’Algérie, elle-même, s’asseye autour de la table.  Le plus tôt serait le mieux. Pour tous.


Manhasset 4 aura lieu du 11 au 13 mars prochain

Le quatrième round de négociations se déroulera du 11 au 13 mars 2008 à Manhasset, a annoncé Peter van Walsum, l’envoyé personnel du SG de l’ONU pour le Sahara.
L’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara, Peter Van Walsum, a annoncé, mercredi, que les parties aux négociations sur le Sahara ont convenu de se retrouver pour un quatrième round de pourparlers du 11 au 13 mars prochain à Manhasset.
Dans un communiqué rendu public à l’issue du 3ème round des négociations, M. Walsum a également indiqué qu’il a «l’intention de se rendre bientôt dans la région pour des consultations approfondies», intention dont «les parties se sont félicitées».
Il a, en outre, souligné que lors de ce round, «les discussions se sont concentrées sur la mise en oeuvre des résolutions 1754 (2007) et 1783 (2007) du Conseil de sécurité», notant que «les parties ont continué d’exprimer de fortes divergences de vue sur les questions fondamentales en jeu».
Dans le même temps, a-t-il précisé, «les parties ont réaffirmé leur engagement à faire montre de volonté politique et à négocier de bonne foi, comme le demandait le Conseil de sécurité, et sont convenues qu’il était nécessaire de faire entrer le processus dans une phase de négociation plus intense et davantage axée sur le fond». Le facilitateur des Nations Unies a relevé que «les parties ont discuté mais ne se sont pas mises d’accord sur les mesures de confiance».
«Elles ont également eu des discussions préliminaires sur des sujets thématiques tels que 1’administration, les compétences et les organes», a-t-il affirmé, par ailleurs, dans ce communiqué.
Le troisième round des négociations sur la question du Sahara a pris fin, mercredi après-midi, à Manhasset près de New York.
Des délégations du Maroc, du Polisario, de l’Algérie et de la Mauritanie ont pris part à ces pourparlers, tenus sous l’égide des Nations Unies.
Deux précédents rounds des négociations se sont tenus respectivement en juin et août derniers, également à Manhasset.

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