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Maroc-Espagne : Le juge Garzon s’invite dans le voyage au Maroc du Prince héritier espagnol

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Le juge espagnol, Baltasar Garzon, a décidé d’engager des poursuites judiciaires contre des responsables marocains pour des présumés délits de génocide. La décision du juge d’instruction de l’Audience nationale espagnole intervient suite à la plainte déposée par des personnes vivant sur le territoire espagnol et prétendant avoir été victimes de violations de leurs droits qui auraient été commises par des responsables marocains notamment des services de sécurité.
Ces accusations concernent 13 personnes dont des hauts responsables en fonction et des ex-commis de l’Etat. Il s’agit du commandant de la gendarmerie royale, le général Housni Benslimane, de l’ancien directeur général de la Sûreté nationale, Hafid Benhachem, de l’ancien patron de la DST, Abdelaziz Allabouch ainsi que des officiers de la gendarmerie royale et de la sûreté nationale.
Le juge Garzon a néanmoins épargné 11 autres personnalités marocaines citées par les plaignants. «Il n’avait pas le choix, estime un observateur marocain, puisque le contraire l’aurait ridiculisé davantage». En effet, il s’agit de responsables qui, à l’époque des faits, étaient encore sur les bancs de l’université comme c’est le cas pour l’actuel patron de la Direction générale des études et de la documentation, Yassine Mansouri. Le juge n’a pas non plus engagé de poursuites contre l’inspecteur général des Forces auxiliaires, le général Hamidou Laânigri étant donné que ce dernier n’avait aucun lien avec le dossier. Faut-il rappeler que les soi-disant faits reprochés aux personnalités marocaines accusées par le juge espagnol se situent entre 1976 et 1987 ? Aussi, adopter la liste des noms telle que présentée par les plaignants aurait mis en évidence la nature politicienne de l’affaire.  Il fallait bien une touche de Garzon pour que tout ait l’air d’être une affaire sérieuse et crédible. «Quand un juge se rend compte que la moitié de la liste des accusés par les plaignants est non fondée et que la plainte compte plusieurs contradictions, il est censé rejeter toute l’affaire étant donné qu’elle sent la calomnie», estime un juriste marocain. Le juge Garzon, lui, il estime qu’il faut aider le plaignant à rendre plus crédible sa plainte. C’est ce que Garzon a fait dans cette affaire lorsqu’il a fait tout un effort pour trouver parmi les noms que les plaignants lui avaient présentés, ceux qui peuvent faire l’affaire.
Ainsi, il a sélectionné 13 noms qu’il a inclus dans sa liste à lui et qu’il va envoyer, dans les prochains jours, à la justice marocaine pour demander sa collaboration dans le cadre d’une commission rogatoire.
Cette demande de collaboration a été signée par le juge espagnol, le 29 octobre 2007, soit plus de 13 mois après le dépôt de la plainte.
Le choix de la date est très significatif puisqu’elle coïncide avec la visite au Maroc des Princes des Asturies, Felipe de Bourbon et son épouse. Ce qui renseigne sur l’objectif escompté par celui qui a décidé de réagir en ce moment précis à une plainte qui date d’il y a un plus d’un an.

 


Baltasar Garzon : Le cheval de Troie des Populaires 

Interrogé par des journalistes sur la décision du juge espagnol d’engager des poursuites contre des responsables marocains, le ministre espagnol des Affaires étrangères et de la Coopération, Miguel Angel Moratinos qui accompagnait, mercredi, les Princes des Asturies lors de leur visite au Maroc, s’est refusé à tout commentaire. «Je respecte la décision du ministère de la Justice et je n’ai pas de commentaire à faire», a dit le chef de la diplomatie espagnole. Pourtant, s’il n’était pas astreint à un droit de réserve que lui impose son statut, le ministre socialiste aurait beaucoup de choses à dire sur «le cas Baltasar Garzon», car nul ne connaît mieux le juge de l’Audience nationale que les dirigeants du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE). Car, il fut un temps où il était des leurs. Cela n’avait duré que dix mois. Mais, dans un intervalle de temps aussi réduit, le juge Garzon avait réussi à faire beaucoup de mal aux socialistes espagnols alors au pouvoir. C’était fin 1993, Felipe Gonzalez était à sa douzième année à la tête de l’exécutif espagnol et s’apprêtait à affronter les élections législatives dans un climat politique marqué par le chahut provoqué par la droite soutenue par des médias autour de certaines affaires de corruption dont les enquêtes étaient menées par le juge Garzon. Ce dernier manifeste son intérêt pour abandonner sa carrière judiciaire et faire de la politique aux côtés des socialistes. La proposition est accueillie favorablement par Felipe Gonzalez. Il se présente aux élections et obtient un siège au Congrès des députés. Il sera ensuite nommé par le chef du gouvernement à la tête d’un département du ministère de l’Intérieur chargé de lutter contre le trafic de drogue avec un statut de secrétaire d’Etat. Mais, au bout de dix mois, le 10 mai 1994, Garzon surprend tout le monde en annonçant qu’il démissionnait de son poste et qu’il allait reprendre sa carrière de juge. Il expliquera sa décision par le fait d’avoir découvert que Felipe Gonzalez couvrait des dossiers de corruption au sein de son gouvernement. Des accusations qui n’ont jamais été prouvées mais qui ont porté préjudice au PSOE puisqu’elles aboutiront à des élections anticipées un an et demi après et qui donneront la victoire à José Maria Aznar. Le PSOE découvrira, tardivement, que le juge Garzon n’était qu’un cheval de Troie envoyé par le Parti Populaire.

O.D


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