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Milouda Hazib : «Cette loi est émaillée de dispositions contradictoires»

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ALM : Quelle évaluation faites-vous du projet de loi de Finances ?
Milouda Hazib : D’abord, nous déplorons la manière dont cette loi a été élaborée et adoptée. Le débat au Parlement n’était que formel, l’examen dans les commissions parlementaires marathonien. Au niveau du contenu, le gouvernement s’est contenté d’une approche unilatérale, sans s’ouvrir sur les différents acteurs économiques et sociaux, notamment la CGEM et les syndicats. Les parlementaires de la majorité eux-mêmes ont déploré n’avoir suffisamment pas été impliqués dans l’élaboration de ce projet. Ainsi manquant d’approche participative, ce projet de loi de Finances marque un fossé entre le gouvernement et les différents acteurs économiques. Cette loi manque de cohérence et est émaillée de dispositions contradictoires. C’est du pur bricolage.  

Quelles sont ces dispositions que vous pointez du doigt ?
Déjà, je note le fait que ce texte ne soit pas basé sur une nouvelle loi organique relative à la loi de Finances comme stipulé par la nouvelle Constitution, il se base toujours sur les dispositions de la Constitution de 1996. Ceci constitue un véritable décalage. Aussi, cette loi de Finances ne comprend pas de facteur de croissance, aucune mesure audacieuse pour faire face à la crise et aucune vision stratégique à long terme. Les prévisions de cette loi sont irréalistes, notamment en promettant une croissance de 4,5%, alors que toutes les prévisions sérieuses nous indiquent que la croissance s’établira à 2,4% en 2013. Même constat pour le déficit budgétaire à 4,8% du PIB, alors que les prix du cours de pétrole sont toujours instables et que nos réserves en devises ne sont que de quatre mois.

Est-ce que cette loi de Finances 2013 reflète le programme gouvernemental ?
Ce budget 2013 ne reflète pas le programme gouvernemental. Où est la réforme fiscale tant promise ? Cette loi de Finances ne fait qu’ajouter des impôts de toutes sortes, éparpillés et confus, au lieu d’être réunis et clairs. Ceci ne favorise en rien l’entreprise marocaine qui souffre déjà de la dégradation patente du climat des affaires. Où est la réforme du système des retraites tant attendue, alors qu’on sait que le nombre de cotisants augmentera de 35 dans 10 ans et de plus que la moitié en 20 ans ? Même chose pour la réforme de la Caisse de compensation dont aucune mention n’est faite dans cette loi de Finances, au même titre que la réforme des contrats publics, ou la régionalisation avancée avec aucun effort pour donner plus de moyens aux régions. Pour ce qui est du volet social, on constate que l’investissement public a reculé de 3% ; le budget de l’enseignement de 2,7%, de la jeunesse et des sports de 30%, les postes budgétaires également passant de 2.600 à 2.400 postes, alors que le Maroc doit créér 250.000 postes cette année pour résorber le chômage. Où sont les 2% de croissance résultant de la lutte contre la corruption promis par le gouvernement ? On ne voit aucun moyen, aucune stratégie contenue dans ce budget 2013 pour atteindre un tel objectif.  Il y a aussi un manque de programme sectoriel pour mettre fin aux disparités de développement entre les régions.
 
Que révèlent toutes ces failles ?
Toutes ces failles nous amènent à conclure que soit le gouvernement manque de volonté politique pour gérer de manière sérieuse et ferme les questions les plus importantes du Maroc, soit il manque d’expérience. Le seul objectif de cette loi de Finances est de préserver provisoirement un certain équilibre macro-économique en l’attente d’une solution providentielle.

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