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Mohamed Benhamou : «Cet attentat vise le modèle marocain»

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ALM : Dans quelle mesure la piste d’Al Qaïda est la plus privilégiée?
Mohamed Benhamou : Dans tout acte terroriste, on cherche une signature notamment à travers la méthode de travail et les moyens et matériaux utilisés. Plusieurs éléments permettent d’avancer la thèse d’Al Qaïda. Il y a d’abord l’aspect symbolique. À ce niveau, le nom du café «Argana» réfère à l’arganier, arbre spécifique au Maroc. Ainsi par ce café ce qui est visé c’est le Maroc en tant que modèle unique. Il y a aussi la symbolique de la place Jamaâ El Fna, un patrimoine universel, signe d’ouverture et de tolérance. Ce café était également fréquenté par les Marocains et les étrangers consacrant la dimension au dialogue des cultures. Ce café se situe aussi en face d’un commissariat de police, ainsi cet acte terroriste constitue un défi à l’Etat.

Et au niveau technique ?
Outre la signature symbolique d’Al Qaïda, l’empreinte de cette organisation se reflète dans la recherche du plus grand impact médiatique. Dans ce sens, le choix de Marrakech, une ville connue à l’échelle internationale, n’est pas fortuit. L’empreinte réside aussi dans la recherche d’un maximum de victimes. L’impact de l’explosion a produit un trou énorme et a dévasté une grande partie du café. Le but est de créer l’horreur. Les terroristes veulent faire perdre aux citoyens la confiance en leur service de sécurité et montrer que l’Etat est faillible et qu’ils sont les plus forts. Techniquement, on note l’utilisation d’explosifs mélangés à des cloues et d’autres matériaux pour faire le maximum de dégâts. Une autre spécificité, cette fois, réside dans le fait que cet acte n’a pas été commis par un kamikaze, c’est un acte qui n’est pas artisanal et qui est plus sophistiqué étant qu’il a été contrôlé à distance. Mais cela révèle aussi que les commanditaires ont eu du mal à recruter. Les jeunes ont de l’espoir en l’avenir. Aussi, la possibilité que d’autres explosions aient eu lieu a aussi été évoquée à la télévision par un témoin oculaire, elle constitue une signature mais elle reste à vérifier.

Quel pourraient être les éventuels autres commanditaires de cet attentat ?
Le fait que beaucoup d’éléments plaident pour la piste d’Al Qaïda, n’exclut pas que les commanditaires de cet acte puissent être ailleurs. Si à l’échelle locale, cet acte aurait pu être commis par des Marocains, il faut voir si les commanditaires sont marocains ou non, des groupes étatiques ou autre. Trois jours avant l’acte, il y a eu une vidéo de l’Aqmi. Celle-ci est douteuse, selon mon analyse. Je n’écarte aucune manipulation étrangère de cette vidéo. Par ailleurs, sur le plan international, la condamnation est unanime. Il faut savoir qu’aucun Etat n’est à l’abri, ça aurait pu se passer dans n’importe quelle capitale du monde. On est face à un ennemi qui avance à visage masqué sans prendre en compte les frontières. Le terrorisme n’a pas de nationalité. Il frappe là où il peut faire le plus de mal.

Quelles seront les répercussions de cet attentat sur la dynamique de réformes?
Ceux qui ont commis cet acte pensent que le Maroc va adopter l’approche du «tout sécuritaire» qui ne peut que porter atteinte à la crédibilité des réformes. Mais les instructions de SM le Roi pour une enquête transparente inscrite dans le respect des lois confortent le choix résolu pour un Etat fort, c’est-à-dire un Etat de droit, un Etat démocratique. Il s’agit là d’un choix irréversible. Les auteurs de cet attentat cherchent à créer un climat de tension entre l’Etat et des acteurs politiques et sociaux en l’occurrence les courants islamistes, au moment où le Maroc a engagé une approche de liquidation des dossiers des détenus politiques y compris salafistes. Cet attentat vise, avant tout, le modèle politique marocain qui dessine son avenir avec raison, des objectifs clairs et un engagement de toutes les composantes de la société. Cet attentat prend pour cible le Maroc qui se distingue des autres pays arabes où le changement se fait dans la douleur, le chaos. Cet acte a pour objectif d’entraver l’élan économique du Maroc et fragiliser sa position en faisant fuir à la fois les investisseurs et les touristes. Le Maroc en tant que terre de dialogue, de tolérance et d’ouverture est aussi visé.

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