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Offices : Comment votre argent est foutu en l’air

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Il y a 127 établissements publics. Entre offices, régies autonomes et entreprises publiques au Maroc. Ces entités gèrent la partie la plus importante des finances de l’Etat. Une gestion qui demeure entourée de flou malgré les quelques signes de bonne volonté affichés par le gouvernement de l’alternance et qui avait promis de briser le tabou en ce qui concerne la comptabilité et l’administration des établissements publics.
Une promesse qu’il n’a pas su tenir étant donné la complexité du problème, d’une part, et l’absence d’une vraie volonté politique d’aller de l’avant dans le projet, d’autre part.
Aussi, les finances desdits établissements ne figurent toujours pas sur la loi de Finances, ce qui empêche les élus de la nation de se pencher sur les différentes rubriques qui devraient composer leurs budgets annuels. De ce fait, ils échappent au contrôle législatif que les députés sont censés exercer sur la destination qui est réservée aux fonds publics et de s’assurer de la bonne gouvernance de ces entités. Un contrôle qui constitue l’un des fondements de base de la démocratie étant donné que la règle principale de la transparence de la gestion des affaires publiques est la soumission de l’affectation des budgets publics au visa des représentants de la nation.
Ainsi, si la loi de Finances inclut, chaque année, toutes les dépenses et les recettes de l’Etat et présente avec détail tous les budgets de fonctionnement et d’investissement des différents départements ministériels, elle omet de présenter les opérations financières des offices et des entreprises publiques.
Toutefois, la loi de Finances se réfère aux établissements publics dans deux cas uniquement et ce lorsqu’il s’agit d’annoncer une recette ou une dépense. C’est ce que l’on appelle les transferts de fonds. En général, il s’agit des cas où l’Etat accorde une subvention à un établissement public ou lorsque le Trésor reçoit une participation de l’entité publique dans le cadre du payement de taxes ou de simples opérations de transfert d’excédent au profit de la caisse de l’Etat. Hormis ces deux cas, la loi de Finances se contente d’annoncer le budget global des investissements que les « Établissements et entreprises publiques » comptent réaliser pour l’année concernée.
Par exemple, la loi de Finances pour l’année 2005 précise que les programmes d’investissement des entreprises et établissements publics s’élèvent globalement à 41,63 milliards de dirhams environ. Ce montant couvre notamment les secteurs de l’énergie, des télécommunications, de l’habitat, de l’agriculture, de l’électricité, de l’eau potable, des phosphates et leurs dérivés, des autoroutes ainsi que des transports aériens, maritimes et ferroviaires. Mis à part ce volet que le ministère des Fiances insère dans la loi de Finances pour gonfler le montant global des investissements publics, toutes les rubriques financières des budgets desdits établissements ne sont guère mentionnées.
Dans la loi de Finances, on ne retrouve pas les détails des prévisions budgétaires des offices, ni leurs projections en matière de recrutement ou d’affectations de l’argent public qu’ils envisagent de faire.
En un mot, le législatif est écarté de tout ce qui a trait à la gestion des offices et des EEP. Ce qui signifie qu’ils restent à l’abri du contrôle parlementaire. Mais, les députés peuvent néanmoins accéder aux comptes des établissements publics dans une seule situation à savoir lorsqu’ils le demandent dans le cadre d’une commission d’enquête.
Le cas le plus célèbre à ce propos fut celui du CIH dont les comptes ont fait l’objet d’un audit exhaustif de la part des députés dans le cadre d’une commission parlementaire d’enquête.
Or, l’objectif principal du contrôle exercé par le Parlement sur le budget de l’Etat est d’éviter que l’on arrive à des situations de détournements de fonds publics comme ce qui est arrivé dans le cas de cette caisse ou des autres établissements étatiques qui ont connu des malversations.
En l’absence du contrôle législatif, les finances des EEP sont uniquement supervisées par une direction spécialisée au ministère des Finances et de la Privatisation.
Il s’agit de la Direction des entreprises publiques et de la Privatisation (DEPP). Officiellement, cette direction est chargée du contrôle financier de l’Etat sur les établissements et les entreprises publiques, la surveillance du portefeuille public, la participation aux actions de rationalisation et de restructuration des EEP, l’audit externe des EEP, la normalisation comptable et le transfert des entreprises publiques au secteur privé.
Ce département assez particulier du ministère des Finances a donc le pouvoir absolu en matière de supervision de la gestion des offices et des entreprises publiques. Une mission qu’il ne doit certainement pas accomplir comme il est censé le faire. Car, si sa démarche était efficace, l’on ne serait pas arrivé à des situations aussi scandaleuses comme celles de la CNSS, du Crédit immobilier et hôtelier (CIH) ou de la Banque nationale de développement économique (BNDE) et la liste est très longue.
Ces cas de malversations et de détournements de fonds qui ont duré des décennies en toute impunité montrent que le système actuel est défaillant et que le temps est venu pour mettre fin à cette entorse aux principes de la transparence pour ce qui est des 127 offices et établissements publics. Il suffira d’un peu de courage et de bonne volonté de la part du gouvernement pour que les choses s’améliorent.

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