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«Pas de politique réelle pour les immigrés»

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ALM : Quel est le poids que représente la communauté marocaine sur l’échiquier des élections présidentielles en France et quels en sont les enjeux ?
Abdelkarim Belguendouz : Deux scrutins sont attendus en France : l’élection d’un nouveau président et le renouvellement de l’Assemblée nationale. A ces deux élections fondamentales au plan politique, seuls ceux qui ont la nationalité française ont le droit de s’y présenter. Les étrangers, eux, ne possédant pas ce droit, ne peuvent pas se présenter à la candidature, ni voter. La France, contrairement à d’autres pays, comme les Pays-Bas et la Belgique, reste très en retard par rapport à cette question d’accorder le droit de vote à la communauté étrangère, pourtant très importante.
La communauté marocaine en France représente 1,3million (chiffre français) de personnes. Mais on ne connaît pas le nombre des Marocains détenant la double nationalité ou ayant obtenu la nationalité française et qui sont donc considérés éligibles et ayant le droit de vote aux prochaines échéances. On ne peut pas connaître leurs comportements : vont-ils exercer leur droit en France ou au Maroc ou les deux ?
On sait qu’en prévision des élections de 2007, le Parlement devrait mettre en application les instructions de SM Mohammed VI (telles qu’annoncées dans son discours du 6 novembre 2005) permettant aux jeunes marocains établis à l’étranger de voter et de se porter candidats aux élections. Mais rien n’a été fait, pour le moment.  Le projet de loi n°23-06 modifiant et complétant la loi 9-97 formant code électoral stipule que les Marocains des deux sexes, nés hors du territoire du Royaume et résidant à l’étranger peuvent demander leur inscription sur les listes électorales générales et présenter leur candidature dans la commune sur la liste électorale dans laquelle ils sont inscrits.

Comment est perçue cette double nationalité par les candidats actuels des élections présidentielles ?
En France, une binationalité bien assumée par les personnes qui se considèrent citoyen là-bas et ici est mal vue par les responsables et les acteurs politiques. Ceci veut dire qu’une reconnaissance de l’exercice par rapport au Maroc du droit politique des Marocains résidant en France serait implicitement un frein et un obstacle à leur intégration dans leur pays d’accueil qui doit être l’objectif. Permettre aux Marocains de s’impliquer dans les institutions marocaines serait, selon les opposants à cette démarche organique, un danger «identitariste» et un encouragement à la déferlante identitaire, une dérive ostensiblement communautariste à éviter à tout prix pour permettre une meilleure intégration dans le pays d’accueil et ne pas provoquer pour celle-ci un brouillage et un parasitage. Bien entendu, d’autres enjeux doivent être relevés liés au statut futur de l’immigré et aux droits des étrangers en France, dont les Marocains, en fonction du camp qui sortira victorieux, d’abord des présidentielles et ensuite, des législatives contenu de la dynamique que créera certainement la désignation du futur ou de la future locataire de l’Elysée. Le maintien de la droite au pouvoir ne pourra qu’encourager une politique d’immigration encore plus restrictive.

Est-ce que ces élections peuvent faire face à l’extrême droite en ce qui concerne, entre autres, l’accès à la nationalité et le regroupement familial des immigrés ?
Relevant tout d’abord que la percée de l’extrême droite est bien réelle. Le séisme du 21 avril 2002 l’a bien prouvé avec l’arrivée de Le Pen au second tour des présidentiels et l’éviction de Jospin. Les législatives actuelles peuvent très bien nous cacher des surprises de ce type. La droite actuelle empiète déjà sur le territoire de l’extrême droite. Le discours de Sarkozy sacralisé, dimanche dernier, sur l’immigration «subie», sur la violence urbaine et la «racaille» d’origine  étrangère archère, faisant de l’immigré une menace sociale et politique donne un avis goût… Sarkozy a proposé une loi en matière de regroupement familial au profit des étrangers résidant en France, mais son discours reste toujours à tendance sécuritaire. Ségolène, elle, malgré les critiques, a le mérite et la clarté de chasser sur le terrain de l’extrême droite, plus à droite que l’extrême droite.  Mais le PS n’a pas encore de réelle politique vis-à-vis des immigrés.   

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